Pour comprendre les medias (27/08/2005)

Chaud & Froid dans les Médias

Pourquoi la TV actuelle est-elle aussi merdique ?
La réponse est dans le bouquin de Marshall Mac Luhan qui analyse les différents médias existants à son époque (1964), et les classe en 2 catégories.

Les ‘médias’ (langage, argent, journal, mode, radio, etc.) sont des supports de transmission de l’information sous forme d’un ‘message’ plus ou moins complexe, plus ou moins parasité par un ‘bruit de fond’.
Leur forme exerce une action d’autant plus profonde qu’elle nous échappe, notre attention étant monopolisée par le message.
Or, un même message n’aura pas la même portée et la même interprétation selon qu’il est véhiculé par un médium ‘chaud’ ou un médium ‘froid’.
C'est cet aspect qui est exploité par les publicitaires et les responsables de télés pour mieux nous conditionner.

Un médium est dit ‘chaud’ quand la densité de l’information transportée est élevée : télé moderne, cinéma, journaux, publicité, photographie, …
Il est dit ‘froid’ quand la densité de l’information transportée est faible : conversation, téléphone, livre, estampe, écriture hiéroglyphique, télégraphe, email, …
Dans ce cas, la pensée du récepteur a tendance à combler les vides, et incite donc à l’interpolation, à la réflexion, à la participation active.
Les médias chauds sont par contre dé-responsabilisants, le cerveau étant noyé sous un flot d’informations qui ne lui laisse plus le temps de respirer.
Il existe évidemment toute une gradation du très froid au très chaud.

Vous me direz (si vous avez lu le bouquin) : mais Mac Luhan, dans son livre il dit souvent que la télé est un médium froid !
En effet, mais rappelez vous la télé des années 60. Elle était petite, en Noir & Blanc, avec une image et un son pourri. C’était bien un médium froid. Les émissions de l’époque étaient plutôt de bonne qualité, avec une forte tendance éducative et un cérémonial (des présentateurs, des speakerines) important.
Avec le progrès technologique croissant (TV grands formats, couleur, 16/9, haute définition) la quantité d’information transmise a augmenté, ce qui l’a transformé en médium nettement plus chaud. La qualité a donc baissé en conséquence. CQFD.

Conclusion : si vous voulez être moins con, jetez votre télé, et mettez vous au frais en lisant des livres.

Passons maintenant en revue le cas des films en salle.

Le cinéma est à priori un médium chaud.
Les écrans sont larges, la définition (en nombre de pixels) est élevée, le son est d’excellente qualité, les décors hyper-réalistes.
L’œil n’arrive en général pas à voir tout ce qui se passe sur l’écran. Il se focalise sur les personnages principaux, et il faut revoir un film plusieurs fois pour saisir les petits détails présents à l’arrière plan.
Cela donne un cinéma de divertissement (‘entertainement’ comme disent les américains), formaté pour le plus grand nombre, où on est prié de laisser son cerveau au vestiaire.

Maintenant, ça ne veut pas dire que tous les films suivent ce schéma.
Le réalisateur et les producteurs peuvent décider de faire un film plus ‘froid’ que la moyenne.

C’est le cas notamment des documentaires, réalisés avec des moyens moins importants (super 8, caméra DV, etc.) où l’image et le son sont de moins bonne qualité, et qui sollicitent plus l’attention du spectateur.

C’est aussi le cas du dessin animé traditionnel (en 2D, sans images de synthèse). La définition de l’image est moins élevée, le jeu de couleurs est réduit par rapport à la réalité, le nombre d’images par secondes est souvent plus faible, le dessin simplifie les formes, les décors sont frustes.
C’est pour cela qu’il est très apprécié des enfants (même si le dessin animé n’est pas ‘à priori’ un support pour les enfants), car il leur permet de participer activement au déroulement du film.

C’est le cas aussi du cinéma dit d’auteur ou ‘indépendant’, où le réalisateur laisse tomber la surenchère d’effets spéciaux, et reste près du modèle cinématographique ‘classique’ des années 40-50.

L’aboutissement ultime de cette volonté de ‘refroidir’ le médium cinéma, c’est ce que Lars Von Trier a voulu faire avec le Dogme 95 ("Les Idiots") où la réalisation est épurée à l’extrême et où l’œuvre fictionnelle devient un pseudo-documentaire, ou le Dogme 99 ("Dogville") où décors, lumières, costumes sont quasi-inexistants et où le résultat est alors très proche du théâtre filmé.

Pour aller plus loin:
> "La Méditation pour les Nuls": pour une approche de la méditation simple et compréhensible par tous, un bon moyen de se 'refroidir' le cerveau, trop chauffé par l'agitation médiatique.

20:00 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Culture, Médias, Technologies |  Imprimer