Dead Like Me (01/04/2006)

La Mort, Ecole de la Vie.

Dans l’Antiquité gréco-romaine, les morts rejoignaient les Enfers en traversant le Styx sur la barque de Charon. Au Moyen Age chrétien, la Mort prend la forme d’un squelette vêtu de noir et armé d’une faux. Le 19-ième siècle en fait plutôt une jeune femme en noir au teint cadavérique [1]. De nos jours la mort est devenue impersonnelle, et se réduit souvent à un ordinateur de surveillance qu’on débranche quand l’encéphalogramme est devenu plat [2]. En Chine, après le passage devant les juges infernaux, on rejoindra selon les cas le "Paradis de la Terre Pure" ou les Enfers, on transmigrera dans un nouveau corps, ou on restera hanter les vivants [3][4]. Les personnes décédées de façon violente sont condamnées à errer ici-bas sous forme d’esprits vampiriques, notamment les jeunes filles vierges, mortes sans descendance [5][6].
"Dead Like Me" est plutôt proche de cette dernière conception, qui implique tout un univers bureaucratique chargé de gérer les transferts d’un univers à l’autre.

Georgia (extraordinaire 'Ellen Muth'), 18 ans, ex-élève médiocre, en conflit avec ses parents et qui n’a jamais rien fait de sa vie (même pas de petit ami), se retrouve pulvérisée, le premier jour de son premier job, par la retombée sur Terre des toilettes de la station Mir. Elle est obligée d'intégrer un groupe de 'faucheurs' ('soul reapers') ou 'non-morts' ('undead') chargés d’accueillir les défunts et de faciliter leur passage vers l’Au-delà. Ils reçoivent chaque jour la liste des victimes prévues (noms, lieux et heures estimées de décès), la mort étant causée par des espèces de petits monstres invisibles, personnification du Destin.
Le nombre de victimes pouvant être pris en charge par un 'faucheur' ne pouvant qu’être faible, il existe ainsi tout un deuxième monde d’Entre-deux, vivants en nombre à nos côtés en attendant de passer définitivement 'de l’autre côté'. C’est le monde des spectres et des fantômes, visible à la fois par les morts et les vivants, et qui se nourrit en parasitant le monde réel. En effet, pour nourrir et loger leur nouveau corps, ils sont bien obligés de se débrouiller, car il n’est pas question pour eux d’être payé par l’administration céleste! Selon leurs personnalités, certains prennent un job légal sous leur nouvelle identité factice, d’autres détroussent leurs 'clients' ou se livrent aux trafics les plus divers.

Les récits sont assez jubilatoires, surfant sur les fêlures et le cynisme des personnages (il en faut pour ce 'métier') et explorant leurs réactions face à la diversité des situations. Pas facile en effet de récupérer l’âme d’un enfant innocent, ou celle d’un membre de son entourage proche. C’est aussi une excellente réflexion sur la Vie et la Mort dans notre société, une très bonne satire de la vie de famille traditionnelle nord-américaine, et une critique féroce de la vie de bureau et de ses rites obligés (rapports hiérarchiques, relations entre collègues, hypocrisies, consensus factices, inutilité de certaines tâches, …).

Une série à consommer donc sans modération. La seule chose que vous risquez, c’est d’en mourir … de rire.

Note: 9/10

Compléments :
> Le site officiel de la série.
> Les fiches de "LaSériethèque", de "Jimmy" et de "Wikipedia".
> Les critiques de "DvdRama", "EcranLarge", "DvdCritiques", "SerialMaster".
> Sur les blogs et sites perso: "DeadLikeMe", "Hypnoweb", "AuBoutDuMonde".

Connexions :
[1] Cf. "La mort du fossoyeur" de Carlos Schwabe (Musée du Louvre, Paris).
[2] Cf. "L’Heure du Grand Passage: Chronique de la Mort" de Michel Vovelle (Découvertes Gallimard): l’évolution des rites et cérémoniaux funèbres en Occident, ainsi qu’une iconographie très riche.
[3] Cf. "La Mort dans les Religions d’Asie" de Bernard Faure (Dominos Flammarion): les pratiques rituelles funéraires asiatiques.
[4] Cf. "Le Roi-Singe" de Stephen Chow.
[5] Cf. "The Grudge" de Takashi Shimizu.
[6] Cf. les "Histoires de Fantômes chinois" de Ching Siu-Tung.

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