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15/10/2006

Le Parfum: Histoire d'un Meurtrier (Das Parfum - Die Geschichte eines Mörders)

Un "Monstre" qui veut nous mener par le Bout du Nez.

Difficile de représenter au cinéma, un récit principalement basé sur des sensations olfactives. Peu de films se sont risqué sur ce terrain glissant ("Parfum de Femme" et son remake "Le Temps d’un Week-end"). N’ayant pas lu le roman (je me méfie des 'best-sellers' encensé par ceux qui ne lisent que ça), je ne pourrais malheureusement pas faire la différence entre ce qui appartient à Süskind et la vision qu’en a faite Tom Tykwer. Mais le film forme un tout cohérent, qui se suffit à lui-même.

La première heure est particulièrement réussie. En combinant gros plans, montage serré avec une alternance de plans sur les objets sentis ou leurs supports (mouchoirs, flacons, …) et des images fortes (crasse, vomi, ordures, …) le film arrive à suggérer les odeurs de façon très réaliste (du moins si vous avez une mémoire olfactive normalement développée). L’aspect visuel est alors particulièrement soigné, avec un Paris du 18-ième siècle crédible et bien reconstitué. L’humour noir qui baigne le récit est alors très en phase avec les scènes décrites. Seuls points négatifs une voix off trop présente, et l’aspect particulièrement énervant d’une musique plutôt pompeuse.

La deuxième partie est plus classique, et perd malheureusement ce qui faisait l’originalité du début. Si les décors des environs de Grasse (apparemment tournés en Espagne) sont bien rendus, le scénario devient très répétitif, enchaînant les meurtres de façon métronomique, et on finit par s’ennuyer de ces longueurs. On aurait pu alléger cette partie, qui constitue le ventre mou du film. L’intérêt est heureusement relancé par la découverte du meurtrier, mais les 2 scènes de fin, grandiloquentes et ridicules, laissent dans les yeux un goût de bâclé et d’inachevé. Le casting est néanmoins très bon, avec une mention spéciale pour Ben Wishaw très convaincant dans un rôle quasi autistique.

Sur le fond, "Le Parfum" est un objet bizarre qui mêle plusieurs influences. On retrouve le mythe du monstre de Frankenstein, créature a-morale et innocente, qui recherche le sens de sa vie et tue presque malgré elle (le premier meurtre, ou la scène avec le chat par exemple). C’est aussi l’histoire d’un être incomplet (sans odeur, sans sentiments) qui cherche par la chimie à accéder à la complétude. On y trouve aussi la quête des alchimistes pour obtenir leur 'Pierre Philosophale', le parfum ultime remplaçant le philtre d’Amour Universel en tant que 'Grand Oeuvre' à accomplir (Cf. aussi "Dr Jekyll et Mr Love" de Jerry Lewis). L’aspect messianique est également très marqué. Grenouille, ange déchu et diabolique (tous ceux qui se sont servi de lui meurent immédiatement dès qu’ils ne lui sont plus utiles), cherche à subjuguer la communauté des hommes en créant un Graal artificiel à partir d‘extraits sélectionnés de Vierges. Son supplice est censé se passer sur une croix. Sa mort est l’occasion d’accéder à une condition divine en faisant don de sa chair et son sang. C’est aussi un être asexué, son attrait pour les femmes se limitant à leur odeur (leurs phéromones). La partouze finale (homo et hétéro mélangés) lui montre son échec. S’il est reconnu comme un être supérieur, il est définitivement exclu du genre humain, incapable de participer à ce qui est le critère fondamental dans la définition d’une espèce (la capacité de reproduction via le sexe). A en juger par les réactions sur les blogs, ce film semble d’ailleurs avoir particulièrement marqué les communautés gays et lesbiennes, assez sensibles à ce thème.

Note : 6/10

Compléments :
> Le Site du Film.
> "Le Parfum": le 'best-seller' de Patrick Süskind, dont est tiré le film.
> Les critiques de "CommeAuCinéma", "iMedias", "Fluctuat", "Excessif", "FilmDeCulte", "EcranNoir", "EcranLarge", "AvoirAlire", "Horreur.com".
> Sur les blogs: "Krinen", "SebInParis", "Matoo", "Niklas", "Ah!QueLaVieEstBelle", "BlackPulse", "Klendal", "Kestendi", "Orpheus".

09/10/2006

Florence Foresti: Sketches

Florence ForestiUne bonne Cervelle de Canut.

J’ai déjà eu l’occasion de dire tout le bien que je pensais de cette actrice/humoriste à l’occasion de la sortie de "Dikkenek". Elle y interprétait le rôle d’une commissaire de police belge lesbienne, avec une force de conviction redoutable.

Un DVD de son spectacle à La Cigale, vient également de sortir, suites de satires de la vie quotidienne où elle brocarde les bobos, les célibattantes, les 'pipôles', etc.

Foresti à l'OlympiaCeux qui regardent encore la TV peuvent également la retrouver dans les émissions de Laurent Ruquier (France2), avec des personnages hauts en couleurs qui commentent l’actualité franco-parisienne. Pour ceux qui ont jeté leur poste depuis plusieurs années, il est possible de retrouver ces petits bricolages, en partie improvisés sur le site de vidéos partagées YouTube [1]. Il y du bon (Ségolène Royal, 'Brigitte', 'Clotilde', …) et du moins bon, mais c’est souvent très drôle et ça dénote un vrai talent, tant dans la construction des sketches que dans leur interprétation. A Voir sans modération [2].

Note: 8/10

[1] Merci à "Matoo" et au "Nain de Jardin Masqué" de m’avoir fait indirectement connaître ce site.
[2] A l’Olympia (Paris) du 26 au 31 décembre 2006, et en tournée actuellement en province.

> Son site.
> Sa bio sur Evene.
> Interview à l’occasion de la sortie de Dikkenek.

07/10/2006

Films de la Rentrée 2006

Retour de Vacances, Rattrapages Cinématographiques.

Pas beaucoup de chefs d'oeuvres à se mettre sous la dent ces dernières semaines, mais quelques petits films sympathiques qui sortent du lot, en attendant une fin d’année qu’on espère plus dynamique.

> "Je Vais Bien, Ne t'en Fais Pas" (9/10) : Une bonne surprise dans une production française généralement médiocre, nombriliste et qui ressasse les mêmes thèmes éculés. Là, le scénario est assez simple et suit l’évolution d’une jeune fille qui devient adulte à la suite de la disparition mystérieuse de son frère jumeau. Les acteurs principaux sont excellents, que ce soit Kad (bien meilleur que dans ses bouffonneries habituelles) ou Mélanie Laurent (la 'pin-up' de "Dikkenek"). Un film très sentimental, dans le bon sens du terme, qui laisse une impression de bien-être à la "Amélie Poulain". En prime une satire intelligente de la vie de banlieue, très réaliste et qui nous change des états d’âmes des riches bourgeois du quartier latin.
(Voir aussi : "Telerama", "EcranLarge", "KrinEin", "BlogCulturel", "Niklas", "MonFestivalDuCinéma", "Cinémapolis").

> "Indigènes" (7/10) : Le film évènement de la rentrée. 60 ans après les faits, la France se penche sur son passé et parle enfin de ceux qui étaient restés dans l’ombre jusqu’à présent. Le film en lui-même est assez classique, proche du "Soldat Ryan" de Spielberg. Plutôt réaliste, malgré le handicap de Jamel Debbouze, trop manifestement incapable de porter un fusil. A voir plus pour le sujet et la performance des acteurs (palme d’or à Cannes), plutôt que pour le scénario sans surprises. Le film n’a d’ailleurs fait aucune étincelle en dehors de la France. Il aura en tout cas le mérite d’avoir été le premier et d’avoir incité le gouvernement français à réévaluer la pension des vétérans étrangers. Rachid Bouchareb devrait maintenant préparer un film sur les Harkis. Ça permettra peut-être à la France de regarder en face la période des décolonisations.
(Voir aussi: "Excessif", "Fluctuat", "FilmDeCulte", "EcranLarge", "DvdCritiques", "iMédias", "SebInParis").

> "Little Miss sunshine" (8/10) : La dernière petite perle du cinéma indépendant américain. C’est drôle, c’est bien joué, c’est assez féroce avec l’American Way of Life, ses espoirs déçus et ses laissés pour compte. On regrettera seulement sa morale très (trop) familiale. Mais pour un premier film, il n’y a pas grand-chose à jeter. (Voir aussi les chroniques de "DvdCritiques", "FilmDeCulte", "iMédias", "Excessif", "EcranLarge", "Cinémapolis").

20:00 Publié dans Ecrans Larges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma |  Imprimer

01/10/2006

Pelléas et Mélisande, de Maurice Maeterlinck.

Pelléas & Mélisande
Une Tragédie en Noir et Gris : le Passage à l’Age Adulte.

Hier soir, superbe Pelléas et Mélisande au Théâtre de la Ville de Paris. On peut penser ce que l’on veut du texte de Maeterlinck (très novateur en 1892, un peu vieilli pour nos oreilles modernes), mais la pièce reste étonnamment actuelle, comme tous les contes et légendes de notre enfance.

Certes, le fond de l’histoire n’est pas très original. Une jeune femme recueillie et épousée par un vieux barbon jaloux, tombe amoureuse de son jeune beau-frère, et les 2 jeunes amants finiront par en mourir. On a déjà vu cent fois ce thème de l’amour interdit entre 2 jeunes gens emportés par une passion nouvelle pour eux (Hélène et Pâris, Tristan et Iseult, Lancelot et Guenièvre, Roméo et Juliette, Pocahontas et John Smith, etc.).
L’intérêt est ailleurs.
D’abord dans la modernité de la narration, formée de petites scènes très courtes, aux dialogues serrés suggérant beaucoup plus qu’ils n’en disent.
Dans la sonorité des textes, travaillés pour exprimer au mieux les sentiments des personnages. Figure de proue du symbolisme au théâtre, Maeterlinck a bien mérité son prix Nobel (1911).
RapunzelDans la mise en scène parfaite de Jean-Christophe Saïs. Le décor sobre, tout en noir et en gris, servi par un éclairage digne d’un futur 'Molières', rend excellemment l’atmosphère humide et glauque, ainsi que les ombres et les brouillards dans laquelle baigne toute la pièce. Heureusement la salle est petite, sinon les spectateurs du fond risqueraient de ne pas voir grand-chose dans cette pénombre. Seules notes de clarté, les vêtements de Yniold et de Mélisande, symboles de leur innocence.

Tout l’ensemble respire les influences romantiques, gothiques et symbolistes du 19-ième siècle, mais on y détecte aussi d’autres tendances plus modernes pour l’époque (psychanalyse, féminisme). On notera les longs chevaux de Mélisande qui se déroulent comme ceux de la Rapunzel des frères Grimm, et dont la charge érotique est évidente sur ce pauvre Pelléas. L’omniprésence des forêts touffues, grottes, souterrains, fontaines, mares aux odeurs moites et troublantes. La scène de voyeurisme initiée par Golaud, mari jaloux et brutal, qui entraîne la perte de l’innocence du jeune Yniold, propulsé malgré lui dans une réalité pas encore de son âge.
Cris Alvarez Magliano 2004Il y a aussi cette découverte de Mélisande par Golaud, en état de choc, parée comme une princesse et probablement violée par son premier mari le jour de son mariage; la femme battue et humiliée en public par son mari jaloux. Une Mélisande mystérieuse, marquée par le Destin, condamnée à séduire son entourage pour exister, mais dont la présence apporte nécessairement le malheur autour d’elle, une femme fatale dont le thème est omniprésent dans notre monde moderne.

En bref, une très bonne pièce, bien mise en en scène, servi par de bons acteurs, qui devrait envoûter ceux qui savent se laisser séduire par des légendes intemporelles. Elle donne en tout cas envie de voir l’opéra qu’en a donné Debussy, dont les nombreuses versions montées ces dernières années sont une preuve supplémentaire de son actualité.

Note: 7/10

Compléments :
> Pelléas et Mélisande au Théatre de la Ville de Paris en 2006.
> Les critiques de Télérama, LeMonde.
> Pelléas et Mélisande sur VLRom.be.
> L'opéra de Debussy sur le blog de Pierry Cormary.
> Le texte du livret de Debussy, presque identique à celui de Maeterlinck.
> L'histoire de Rapunzel des frères Grimm.