11/10/2007
Le Mariage de Tuya (Tu Ya De Hunshi) de Wang Quan An
Une Mongolie en Sursis.
Je suis toujours étonné quand je vois des gens, qui ne connaissent rien à l’Asie en général et à la Chine en particulier, exécuter un tel film avec quelques phrases assassines.
"Le Mariage de Tuya" n’est ni un vaudeville exotique, ni un pseudo documentaire, racontant la vie pauvre mais digne de peuplades éloignées de nous, et visant à conforter l’ego d’occidentaux repus et suffisants. Il est plutôt dans la lignée des drames sociaux des autres cinéastes chinois de la 6-ième génération ("Still Life", "The World", "Shanghai Dreams", "Blind Shaft", …). Il n’est pas anodin que le film commence et finisse sur les larmes de Tuya pendant son re-mariage.
L’ambiance y est nettement plus adulte et plus sombre que ce que le public a pu voir dans les films de Byambasuren Davaa ("L’Histoire du Chameau qui Pleure" et "Le Chien Jaune de Mongolie"). Si les paysages sont identiques, ces 2 films essayaient plutôt de (re)faire connaître au grand public occidental une Mongolie (la république indépendante) longtemps oubliée dans le no man’s land russo-chinois.
La Mongolie chinoise a ceci de particulier qu’il s’y concentre tous les malheurs et les inégalités frappant la Chine d’aujourd’hui.
Il ne faut pas oublier que c’est une "Région Autonome", désignation officielle chinoise pour un pays colonisé, administré et soumis au pouvoir de Pékin, et où les autochtones n’ont pas leur mot à dire, comme au Tibet ou au Xinjiang.
La vie de tous les jours montre sans fard le système à 2 vitesses imposé de l’extérieur.
Si les minorités ethniques ne sont que partiellement soumises à la politique de l’enfant unique (en l’absence de moyens contraceptifs, cette politique est d'ailleurs vouée à l’échec), la préférence donné au garçons par rapport aux filles entraîne un fort déséquilibre démographique, problématique quand il s’agit de se marier.
Les femmes y sont ici, comme dans beaucoup de pays pauvres, condamnées à une double peine de travail, à la maison et dans les champs.
La désertification, et ses conséquences sur la vie de tous les jours (manque d’eau, raréfaction des pâturages, tempêtes de sables), est principalement due aux déboisements massifs effectués pendant les années Mao (Grand Bond en Avant, Révolution Culturelle) quand la productivité avait été privilégiée aux dépends des équilibres écologiques et du respect des populations.
Les riches, c'est-à-dire les colons chinois et les mongols qui collaborent avec l’administration, peuvent prétendre à un niveau de vie correct, avec tous les privilèges que donnent la possession de Yuans et d’un passeport intérieur (véhicules modernes, soins hospitaliers, maisons de retraites décentes, etc.).
Les autres sont condamnés à se vendre (mariage, abandon du mode de vie traditionnel, prostitution, …) ou à s’enfoncer dans une misère matérielle et intellectuelle (pauvreté, alcoolisme, …).
C'est ce que raconte si bien ce film, via le destin individuel d'une petite bergère et de sa famille et leurs déboires tragi-comiques ("L'éclat de rire est la dernière ressource de la rage et du désespoir", Victor Hugo).
Note : 9/10
Compléments :
> La situation en Mogolie Intérieure sur Strates.
> Le site du film.
> Les critiques de CommeAuCinéma, Rue89, LeFigaro, Telerama, Excessif, FilmDeCulte, Critikat, Cinémasie, OrientExtreme, AVoirAlire, NightSwimming, CriticoBlog.
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10/10/2007
Monkey, Journey to the West de Chen Shi Zheng
A l’Ouest, du Nouveau.
Succès incontestable pour le Théâtre du Châtelet, qui était sorti de sa programmation habituelle en nous proposant une variante modernisée du "Voyage en Occident". Il faut dire que le metteur en scène, Chen Shi Zheng, n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il avait déjà (re)créé une exceptionnelle version intégrale du "Pavillon aux Pivoines (Mudan Ting)" (La Villette, Nov.99) [*].
La salle était pleine, et plutôt peuplé d’une faune de bobos et d'otakus entre 2 âges, peu courante en ces lieux. Il est vrai que le message délivré par les pérégrinations du Roi-Singe est assez universel, et supporte facilement plusieurs niveaux de lecture.
Il y a d’abord le récit d’aventures fantastiques animalières, aptes à captiver les plus jeunes, et qui ont assuré sa transmission au cours des siècles sous forme de conte enfantin.
Il y a ensuite la fable politique, où un moins que rien, né de la Terre et sans ascendants prestigieux, finit par arriver au sommet de la Création, après avoir remis en cause l’ordre établi par les puissants, la bonne société et ses conventions, malgré un passage en prison qui dure quand même 500 ans.
Il y a enfin la parabole bouddhiste, particulièrement présente dans "Monkey", même si de nombreux spectateurs n’y ont peut-être pas été très sensibles (textes en chinois, sur-titrés en français). Le Singe est au départ le symbole de la pensée anarchique, non maîtrisée. Animal, né de la roche, il parcourt successivement les 5 éléments (Terre, Eau, Air, Feu, Ether), en s’élevant au passage, matériellement comme spirituellement. Le cheminement au cours des 9 tableaux renvoie à l’Octuple Sentier et sa mise en œuvre des qualités qui vont le conduire à devenir un Bouddha accompli. La symbolique standard de ce trajet est celle qui est représentée dans tous les stupas/pagodes et mandalas du monde bouddhiste.
L’Opéra chinois est déjà un spectacle complet incluant le théâtre, la musique, le chant, le mime, la danse, les acrobaties, les arts martiaux. Avec Jamie Hewlett, on a en plus des décors, des effets spéciaux et des dessins animés (excellents) qui en font un spectacle total parfaitement intégré. Le résultat est remarquable, quelque que soit le tableau et les personnages (Forêt des Singes, Mer Orientale, Royaume des Cieux, Paume de Bouddha, Femmes Araignées, Montagne Volcanique, …).
A côté, la partition musicale de Damon Albarn, bien qu’intéressante parait un peu trop sage et en retrait. Il réussit néanmoins parfaitement à concilier un style occidental plutôt pop symphonique avec un type mélodique plutôt asiatique (sans les crin-crins des erhus). Seule petite faiblesse, le chant de certains interprètes chinois, sans doute peu habitués à une musique aussi occidentalisée.
Bref une petite merveille, à ne pas manquer pour ceux qui auraient encore l’occasion de le voir (au pire à Berlin en 2008).
[*] CD disponible dans la collection Inédits, Enregistrement video effectué par Arte.
Note: 9/10
Compléments :
> Les critiques de Rue89, Fluctuat, LeMonde, LaLibreBe.
> Sur les blogs: Etapes, Agoravox, Matoo, Cizion, PierreEquoy.
> Video explicative/illustrative de Vincent Durand-Dastès sur Telerama:
Sur la légende du Roi-Singe :
> la version originale ("Xi You Ji") de Wu ChengEn, paru dans la Pléiade.
> la meilleure version ciné: celle de Jeffrey Lau et Stephen Chow (Cf DeVilDead, CinéAsie, DvdRama).
> la version mythique en dessin animé du studio de Shanghai.
> la meilleure adaptation en dessin animé: celle de Saiyuki.
> la version bande dessinée chinoise, "Le Voyage en Occident" par Chen WeiDong et Peng Chao, en cours de publication en France chez Xiao Pan.
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04/10/2007
Birmanie: Journée Blogs Solidaires
Free Burma.
Aujourdhui, 4 octobre, est organisée une journée de solidarité des blogueurs avec le peuple birman.
Plus de détails sur Pointblog et FreeBurma.
D'autres infos sur la Birmanie sur Tibet-Info (là et là) ainsi que sur Rue89 et sur Yahoo Actualités.
Voir aussi les dessins de Chapatte sur Yahoo Cartoons (notamment celui-ci, celui-là et celui-là) et le projet "Birmanie, la peur est une habitude" (malheureusement pas très à jour) sur birmanie.org.
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18/08/2007
Still Life (Sanxia Haoren) de Jia Zhang Ke
Nature Morte ?, Une Vie Tranquille ?, Encore de la Vie ?
Encore un excellent film de la 6-ième génération de cinéastes chinois, commis par celui qui nous avait déjà gratifié du très bon "The World".
"Still Life" (le titre original est plutôt "Les braves Gens des 3 Gorges"), c’est la chronique douce-amère d’une Chine à la dérive, à travers le destin de 2 couples en crise essayant de reconstruire leurs vies, et de tous ceux qui gravitent autour d’eux.
Le site du Barrage des 3 Gorges renvoie à un pays où le passé est systématiquement détruit au nom d’idéologies successives opposées, et où l’aveuglement technocratique et le capitalisme sauvage finissent par mettre en pièce ce que la Révolution Culturelle n’avait pas réussi à supprimer totalement.
Destruction de la cellule familiale, exploitation et spoliation des plus pauvres, affairismes mafieux, retour à un esclavagisme des temps anciens, exode économique forment le quotidien des générations actuelles. Les relations humaines finissent par atteindre le degré zéro de la communication, malgré la généralisation des portables censés assurer le lien des hommes entre eux.
Pourtant, l’espoir demeure parmi les exclus du système, grâce à la solidarité qui les unit dans l’adversité, matérialisée par des échanges de petits riens (une cigarette, un paquet de thé, un verre de vin, un bonbon "Lapin Blanc", …). C’est grâce à eux qu’ils arrivent à supporter leurs conditions déplorables, rêvant à un avenir meilleur, où l’équilibre de nouveau restauré entre le Ying et le Yang leur permettra de surmonter les obstacles et de retrouver une vie normale.
En plus d’images grandioses du YangTsé Kiang autour de Fengjie, une superbe bande son, où chansons passéistes et bruits quotidiens se mêlent harmonieusement pour évoquer une atmosphère à la fois dure et mélancolique.
Indispensable à voir pour tous ceux qui s’intéressent à la Chine d’aujourd’hui.
Note : 8/10
Compléments :
> Le site du film.
> Les critiques de CommeAuCinéma, SanchoAsia, Excessif, Fluctuat, FilmDeCulte, AVoirALire, Critikat, LaLibreBelgique, Aujourd'huiLaChine, CNBDI, LeWebPédagogique, CinéClubCaen.
> Sur les Blogs: CrticoBlog, CinqAnsEnChine, PibeSan, SurLaRouteDuCinéma, CaféGéo, PeauNeuve, TchinTchine, Wodka, Zvezdoliki.
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16/08/2007
Chine du Sud: Notes de Voyage
Lotus Bleu, Péril Jaune, Étoile Rouge.
Un voyage en Chine est toujours l’occasion de confronter la réalité du terrain à une représentation fantasmée, issue du regard d’occidentaux pas toujours objectifs et d’une propagande communiste visant clairement à la désinformation.
Le tourisme y est une activité fortement encadrée, il n’est pas possible d’aller partout, mais malgré les clichés et les mensonges d’État, il n’est pas trop difficile de se faire une opinion raisonnée sur ce pays écartelé entre traditions et modernité.
A terme, l’introduction du ver capitaliste dans la grosse pomme rouge risque d’avoir le même effet qu’en URSS dans les années 80. A la vitesse où vont les choses, le rideau de bambou qui cloisonne encore une grande partie de la société chinoise ne devrait pas résister plus d’une dizaine d’années.
Guides:
Jeunes, inexpérimentés, parlant mal le français (et quelques fois mal l’anglais), peu cultivés, essayant de réciter par cœur des informations standardisées pas toujours exactes et souvent superficielles, ils sont néanmoins indispensables pour effectuer toutes les formalités administratives nécessaires sans perdre un temps trop précieux. Visiter un site en individuel n’est de toute façon pas dans la mentalité chinoise.
Cuisine:
Parfait pour faire un régime, sans se priver ! Diversifiée, restée proche des recettes traditionnelles, non chargée en additifs artificiels de toutes sortes, la cuisine chinoise des campagnes permet d’éviter le surpoids, tout en se faisant plaisir. Dans les villes, par contre, la malbouffe américaine commence à faire des ravages. Le nombre d’obèses est en augmentation constante. Dans un pays où la grosseur était signe de bonne santé, les maladies cardiovasculaires risquent de faire des dégâts importants.
Shopping:
La Chine est l’usine du Monde. C’est aussi le royaume de la contrefaçon. Résultat, difficile d’acheter quoi que ce soit sans risquer de se faire arnaquer. En général, en Europe, le prix de vente est égal à 2 ou 3 fois le prix d’achat. Donc, lors d’un marchandage, il suffit de partir d’un montant égal à la moitié ou au tiers du prix affiché, pour progresser vers un prix d’équilibre qui satisfasse les 2 parties. En Chine, les dés sont pipés dès le départ. J’ai vu des personnes acheter des objets 6 fois moins cher que le prix initial, et un guide nous a dit qu’on pouvait dans certains cas commencer au dixième de la valeur. Comment est-ce possible ? La réponse est simple. La majorité de ce qui est vendu ne correspond pas à la description qui en est faite. Marques contrefaites, antiquités fabriquées à la chaîne, copies pirates, etc., pratiquement tout est vendu comme étant authentique et de bonne qualité. Mais attention aux désillusions. Outre des passages en douane toujours risqués, des risques médicaux non négligeables, et de grosses déceptions financières, on peut être obligé de ressortir rapidement son portefeuille. Un de mes compagnons de voyage ayant acheté une nouvelle valise plus grande, s’est retrouvé fort dépourvu au bout de 2 jours, ayant perdu successivement ses roulettes, ses poignées, pour finir avec des parois déformées par les manipulations peu délicates des manutentionnaires. Les bonnes affaires coûtent souvent plus cher qu’on ne le croit.
Développement économique:
« Quand la Chine s’éveillera, le Monde tremblera » disait Napoléon. La prédiction s’est réalisée. Ces 10 dernières années, le pays a basculé dans un capitalisme débridé, ressemblant par bien des points à celui qui existait en Europe et aux États-Unis à la fin du 19-ième siècle. Puissance des grands conglomérats contrôlés par une petite oligarchie richissime, pas de droit de grève et de syndicats libres, répression des émeutes par l’armée, chasse aux idées démocratiques, libertaires et anti-impérialistes, rien ne manque à l’inventaire. On se croirait dans du Zola. Les plus malmenés sont comme toujours les paysans des régions pauvres, les habitants des régions industrielles sinistrées, les petits salaires, les vieux sans retraites, les migrants illégaux (sans passeport intérieur), les minorités ethniques. Les tensions s’accumulent entre Est et Ouest, riches et pauvres, privilégiés et laissés pour compte, purs chinois et minorités colonisées. Combien de temps la grenouille pourra-t-elle continuer à grossir sans éclater ?
Villes:
Du passé, faisons table rase ! Tel semble être le credo des responsables chinois, détruisant systématiquement les constructions anciennes pour implanter gratte-ciels, autoroutes et autres constructions modernes, fonctionnelles mais sans âme. La population, non indemnisée, n’a plus qu’à aller s’implanter un peu plus loin, et aller grossir les rangs des nouveaux pauvres, exclus de la croissance.
Patrimoine Culturel:
Pourquoi conserver des vieilleries ? Le chinois est pragmatique. Pour lui, ‘restaurer’ veut dire refaire à neuf. Tant pis pour le cachet d’une pièce ancienne. Reconstruction en béton de bâtiments anciens, peintures acryliques pour raviver les outrages du temps, rien n’est trop beau pour avoir de quoi satisfaire un tourisme de masse peu habitué aux subtilités des styles et des techniques anciennes. L’important est de pouvoir se faire tirer le portrait à côté de quelque chose de photogénique. Les quelques pièces historiques croupissent dans des vitrines poussiéreuses qui n’intéressent pas grand monde. Le communisme chinois, tourné vers un avenir forcément radieux, n’a que faire des reliques du Passé.
Drogue:
Le Yunnan n’est pas loin du Triangle d’Or. Ça se voit. Depuis l’ouverture de la région au tourisme, il y a une dizaine d’année, est apparue toute une faune analogue à celle qu’on rencontrait à Katmandou dans les années 70. Venu profiter du bon air des montagnes où poussent sans contraintes cannabis et pavot, ils ont profondément modelés l’offre touristique autochtone. Du coup, le confort n’est pas si mauvais pour un endroit aussi reculé, même si l’authenticité des habitants a beaucoup diminuée au profit d’une certaine folklorisation. Les touristes chinois adorent cette ambiance qui les change de ce qu’ils ont l’habitude de voir. Les policiers ne s’attaquent qu’aux gros trafiquants pour ne pas se mettre à dos les minorités locales. Pour le moment tout baigne. Jusqu’à la prochaine campagne "Frapper Fort" ?
Écologie:
Smog dans les villes, fleuves et lacs pollués, trafic automobile en hausse vertigineuse, la situation environnementale de la Chine se dégrade de jour en jour. L’incivisme chronique des chinois rend difficile toute tentative de réformes. Faudra-t-il une catastrophe écologique majeure avant qu’une petite partie des énormes profits commerciaux du pays soit réinvestie dans des industries plus propres et dans le nettoyage des nombreux sites pollués ?
Propreté:
Le cochon est un des animaux fétiche de la Chine. Symbole de prospérité, c’est aussi un composant essentiel de la nourriture quotidienne. Dans les campagnes, il vit à côté de ses propriétaires, mangeant ses déchets, jouant avec ses enfants, vaquant souvent en liberté avec les autres animaux de la maison. Pas étonnant dans ces conditions que se multiplient les épidémies contagieuses (grippe aviaire, SRAS, HIV, …). Comme en plus, il ne viendrait jamais à l’esprit d’un paysan chinois de se laver les mains régulièrement, de ne pas cracher partout, ou de ne pas fumer là où c’est interdit, il est évidemment difficile de mettre en place une politique sanitaire efficace. Quand aux WCs chinois, ceux qui ont eu l’occasion de les expérimenter savent combien il est difficile de ne pas être incommodé par les odeurs, la promiscuité, l’inconfort et le délabrement des installations, et combien il est important de ne pas oublier d’apporter son savon et son rouleau de papier, car il n’y en a généralement pas.
Minorités:
Théoriquement protégées par la Constitution, les minorités nationales sont en pratique réduites à un statut d’assistés, voyant leur échapper les postes de direction ou à forte expertise technique. Colonisés par les Hans, pur beurre, ils arrivent au mieux à conserver leurs spécificités dans des territoires peu autonomes du pouvoir central, et qui se rapprochent plutôt des réserves indiennes aux États-Unis. Au pire, ils sont culturellement en voie d’extinction, leurs langues et traditions n’étant plus pratiquées par un nombre suffisant d’individus (par exemple, seuls 15 personnes savent encore lire et écrire le dongba à l’heure actuelle).
Religion:
Les chinois ne sont pas religieux, mais ils sont superstitieux. Le communisme (surtout au moment de la Révolution Culturelle) avait pourtant tenté d’éradiquer l’Opium du Peuple. Peine perdue. La libéralisation de l’économie s’est accompagnée d’un renouveau impressionnant des pratiques cultuelles. Mais rien de spirituel là dedans. On se déplace surtout dans l’espérance de bonnes récoltes, dans l’espoir de réussir un examen ou d’avoir un fils destiné à perpétuer la lignée familiale. Outre l’autel des ancêtres, situé dans une des pièces de la maison, il existe de nombreux temples, œcuméniques, ‘restaurés’ ou reconstruits dans le style le plus kitch possible. Taoïsme, Confucianisme et Bouddhisme chinois se disputent l’essentiel du marché, fournis par de nombreux commerces proposant bâtonnets d’encens, statuettes votives ou breloques porte-bonheur. Chacun vient dans les temples comme dans une auberge espagnole, ressortant avec ses espoirs après des prosternations identiques quelque soit le lieu. De toutes façon, pas d’exclusives. Pour mettre toutes les chances de son côté, on ira prier de manière égale Confucius, Lao-Tseu, Bouddha, GuanYin, Jésus ou l’une des innombrables personnalités mythique ou divinisée que compte le panthéon chinois. L’efficacité avant tout.
Dalaï-Lama:
Sa photo est interdite partout. Il est considéré comme un dangereux terroriste, visant à séparer le Tibet de la "Mère Patrie". Mais c’est un personnage incontournable dans le cœur de tous les tibétains et des peuples pratiquant des religions apparentées au Bouddhisme. C’est grâce à lui qu’aucun attentat d’origine tibétaine ne se produit en Chine, alors que des bombes ouighoures y éclatent de temps en temps, posés par des islamistes formés en Afghanistan. On ne le voit pas, mais il est partout. Censé être la réincarnation du bodhisattva de la Compassion (Avalokiteshvara / GuanYin), il est présent à ce titre dans tous les temples, du plus petit au plus grand. La calligraphie du Kalachakra (enseignement dont il est le grand maître) fleurit un peu partout au Yunnan, sous forme d’autocollants apposés sur les vitres. Sa disparition entraînera une grande période d’incertitudes, et risque de sonner le glas de la politique pacifique des tibétains de l’intérieur. Il ne faut pas oublier que les nomades du Kham et de l’Amdo ont coopérés pendant des siècles avec leurs cousins mongols pour le contrôle des steppes asiatiques, et ont en commun la même épopée mythique, celle de Guésar de Ling, le héros qui reviendra restaurer la suprématie des nations tibéto-mongoles (rêve également caressé un temps par von Ungern-Sternberg). Le jour où les mongols s’éveilleront, la Chine tremblera...
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