03/11/2007
Films d'Automne (2007)
Très bon cru, cet automne, dans les salles obscures. On ne sait plus où donner de la tête (et du clavier). Les grêves risquent par contre d'être fatales aux films les plus fragiles et les moins médiatiques. Dommage.
"L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" d'Andrew Dominik (9/10) : Ceux qui n’ont pas aimé "Le Nouveau Monde" ou "La Ligne Rouge" de Terrence Malick vont détester ce film, qui prend également son temps pour poser ses personnages, les laisse évoluer à leur rythme (celui de l’époque, moins stressée que la nôtre), et fait de la Nature dans laquelle ils évoluent un individu à part entière. Le Far-West rural est en train de disparaître, colonisé par les usines, les voies ferrées et les financiers de Wall Street. Comme dans "Mémoire de nos Pères" ou "A History of Violence", le film pose la question du héros, de l’anti-héros, et de la célébrité factice entretenue par les médias. Il rejoint tous les grands films qui ont traité de la naissance des USA modernes ("La Porte du Paradis", "Gangs of New-York", …). Une vraie réussite.
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, Fluctuat, FilmDeCulte, KrinEin, PibeSan, SebInParis, BenzineMag).
"Le Deuxième Souffle" d’Alain Corneau (7/10) : Un bon petit polar à l’ancienne, qui rappelle les chefs d’œuvres du genre (Melville, …). Il ne révolutionnera pas le palmarès, mais se laisse voir sans déplaisir, grâce à une pléiade d’acteurs talentueux et bien adaptés à leur rôle. Seuls regrets, récurrents dans le cinéma actuel, des effets à la John Woo pour la fusillade finale, un placement de produits pas très subtil (champagne Lanson à tous les repas !) et la réutilisation de la même voie ferrée pour des scènes à priori sans rapports entre elles.
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Excessif, FilmDeCulte, KrinEin, PibeSan).
"Chrysalis" de Julien Leclercq (8/10) : Injustement massacré ou ignoré par les critiques professionnels, ce film est la bonne surprise du mois. Polar très noir, dans ses couleurs comme sa thématique, il fait un peu penser au dessin animé "Renaissance", sorti début 2006. Flic intègre et borné, femmes manipulatrices, secrets d'Etats et technologies dévoyées, le scénario n'a rien de très original, mais c'est la loi du genre depuis les années 40 ("En Quatrième Vitesse" par exemple) et le film accumule les bons points (acteurs excellents, décors et design impressionnants, mise en scène efficace, réalisation sans temps morts). A aller voir urgemment pour faire échec à un système qui se permet de dénigrer de tels films en même temps qu'il encense des navets d'une beaufitude incommensurable.
(Voir critiques sur CommeAuCinéma, Excessif, LaSenteurDeL'Esprit, TotalCiné).
Et aussi :
> "Le Dernier Voyage du Juge Feng" de Liu Jie.
> "Secret Sunshine" de Lee Chang Dong.
> "This Is England" de Shane Meadows.
> "Le Rideau de Sucre" de Camila Guzman Urzua.
> "Mon Meilleur Ennemi" de Kevin Mac Donald.
> "Dans la Vallée d’Elah" de Paul Haggis.
> "Les Promesses de l'Ombre" de David Cronenberg.
> "De l'Autre Côté" de Fatih Akin.
> "La Nuit nous appartient" de James Gray.
> "La Graine et le Mulet" d'Abdellatif Kechiche.
> "Un Baiser, s'il vous plaît" d'Emmanuel Mouret.
> "La Visite de la Fanfare" d'Eran Kolirin.
> "XXY" de Lucia Puenzo.
20:00 Publié dans Ecrans Larges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma | Imprimer
13/10/2007
Un Jour sur Terre, de Alastair Fothergill et Mark Linfield
Le Jour d’Avant, épisode 3.
Encore un documentaire dans la lignée de tous ceux qui sont sortis dernièrement sur le même sujet ("La Planète Blanche", "La Planète Bleue", "Le Peuple Migrateur", …).
Franchement, il n’apporte pas grand-chose de plus. Quelques images sont inédites et spectaculaires (essentiellement celles que l’on voit dans la bande-annonce). Mais le commentaire est assez léger et sans grand intérêt, conformément à la mode actuelle qui privilégie l’émotif au factuel. On ressent donc une forte impression de déjà vu.
Oui, la Terre est (était ?) belle. Oui, elle est en danger du fait du réchauffement climatique. Mais est-ce une raison pour multiplier ce genre de films sans grande originalité, simple compilation d’images prises un peu partout, sans scénario élaboré et qui est du niveau d’un simple documentaire télévisuel.
A force de trop se disperser, les réalisateurs finissent par perdre l’objectif initial qui est de sensibiliser l’opinion publique aux problèmes de dérèglement des équilibres écologiques.
Dans ce domaine, on reverra plutôt avec plaisir la démonstration sans concession du nouveau Prix Nobel de la Paix, Al Gore ("Une Vérité Qui Dérange"), ainsi que les documentaires de la National Geographic, bien plus rigoureux dans leur démarche.
A ne voir donc que pour les quelques images superbes qui le parsèment (éléphants nageants dans une rivière, singes traversant un marais, requin blanc chassant les phoques, lions chassant la nuit, …) ou pour ceux qui n’ont pas déjà vu les nombreux clones précédents.
Note: 6/10
Compléments :
> Bande-Annonce et Photos superbes sont disponibles sur le Site du film.
> Critiques sur NotrePlanète, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, FilmDeCulte, DvdCritiques.
> Sur les blogs: AgathA, EcoloPop, Hutako, CinéJulien, TetraPak.
20:00 Publié dans Ecologie, Ecrans Larges, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Ecologie | Imprimer
11/10/2007
Le Mariage de Tuya (Tu Ya De Hunshi) de Wang Quan An
Une Mongolie en Sursis.
Je suis toujours étonné quand je vois des gens, qui ne connaissent rien à l’Asie en général et à la Chine en particulier, exécuter un tel film avec quelques phrases assassines.
"Le Mariage de Tuya" n’est ni un vaudeville exotique, ni un pseudo documentaire, racontant la vie pauvre mais digne de peuplades éloignées de nous, et visant à conforter l’ego d’occidentaux repus et suffisants. Il est plutôt dans la lignée des drames sociaux des autres cinéastes chinois de la 6-ième génération ("Still Life", "The World", "Shanghai Dreams", "Blind Shaft", …). Il n’est pas anodin que le film commence et finisse sur les larmes de Tuya pendant son re-mariage.
L’ambiance y est nettement plus adulte et plus sombre que ce que le public a pu voir dans les films de Byambasuren Davaa ("L’Histoire du Chameau qui Pleure" et "Le Chien Jaune de Mongolie"). Si les paysages sont identiques, ces 2 films essayaient plutôt de (re)faire connaître au grand public occidental une Mongolie (la république indépendante) longtemps oubliée dans le no man’s land russo-chinois.
La Mongolie chinoise a ceci de particulier qu’il s’y concentre tous les malheurs et les inégalités frappant la Chine d’aujourd’hui.
Il ne faut pas oublier que c’est une "Région Autonome", désignation officielle chinoise pour un pays colonisé, administré et soumis au pouvoir de Pékin, et où les autochtones n’ont pas leur mot à dire, comme au Tibet ou au Xinjiang.
La vie de tous les jours montre sans fard le système à 2 vitesses imposé de l’extérieur.
Si les minorités ethniques ne sont que partiellement soumises à la politique de l’enfant unique (en l’absence de moyens contraceptifs, cette politique est d'ailleurs vouée à l’échec), la préférence donné au garçons par rapport aux filles entraîne un fort déséquilibre démographique, problématique quand il s’agit de se marier.
Les femmes y sont ici, comme dans beaucoup de pays pauvres, condamnées à une double peine de travail, à la maison et dans les champs.
La désertification, et ses conséquences sur la vie de tous les jours (manque d’eau, raréfaction des pâturages, tempêtes de sables), est principalement due aux déboisements massifs effectués pendant les années Mao (Grand Bond en Avant, Révolution Culturelle) quand la productivité avait été privilégiée aux dépends des équilibres écologiques et du respect des populations.
Les riches, c'est-à-dire les colons chinois et les mongols qui collaborent avec l’administration, peuvent prétendre à un niveau de vie correct, avec tous les privilèges que donnent la possession de Yuans et d’un passeport intérieur (véhicules modernes, soins hospitaliers, maisons de retraites décentes, etc.).
Les autres sont condamnés à se vendre (mariage, abandon du mode de vie traditionnel, prostitution, …) ou à s’enfoncer dans une misère matérielle et intellectuelle (pauvreté, alcoolisme, …).
C'est ce que raconte si bien ce film, via le destin individuel d'une petite bergère et de sa famille et leurs déboires tragi-comiques ("L'éclat de rire est la dernière ressource de la rage et du désespoir", Victor Hugo).
Note : 9/10
Compléments :
> La situation en Mogolie Intérieure sur Strates.
> Le site du film.
> Les critiques de CommeAuCinéma, Rue89, LeFigaro, Telerama, Excessif, FilmDeCulte, Critikat, Cinémasie, OrientExtreme, AVoirAlire, NightSwimming, CriticoBlog.
20:00 Publié dans Ecrans Larges, Le Village Global | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Chine, Asie | Imprimer
08/10/2007
99 Francs, de Jan Kounen
L'Illusion Comique de l'An 2000.
Le Monde est une Illusion. Celle que notre Esprit se plait à créer sous nos yeux, pour se rassurer d’être vivant, de ne pas être seul, de ne pas être un autre.
Ce n’est pas Jan Kounen qui me démentira, lui qui a laissé tomber le monde lucratif de la pub et du cinéma commercial, pour aller explorer l’univers chamanique, auprès des populations indiennes.
Comme dans un roman de Philip K. Dick, Octave est un rouage important du système (du moins le croit-il) jusqu’à ce qu’il se réveille de son ‘bad trip’, ne sachant plus trop où est la réalité des choses. Kounen et Dujardin connaissent bien le milieu et frappent fort en dénonçant l’élitisme, le fayotage, l’abus de drogues, le racisme ordinaire (surtout pas de noirs à la télé!), la bêtise des donneurs d’ordre, la crétinisation des masses, la lâcheté des individus face à leurs responsabilités (de père, de citoyen, d’amant, …). Mais au-delà de la critique sociale du milieu de la pub et de ses dérives, c’est en effet à un récit initiatique que l’on est convié. Comme l’indique les têtes de chapitres réalisés sous forme de fausses pubs (Je, Tu, Il, Nous, …, Ils), la progression se fait d’un Ego démesuré vers la fusion dans le Grand Tout, via des phases de communion avec les autres (la femme aimée, le chef suicidé, le groupe de collaborateurs, les clients). Les étapes vers l’Éveil se font via des événements dramatiques (rupture, naissance, mort, …) qui ébranlent les certitudes et font apparaître le Monde tel qu’il est. Comme Alice poursuivant le Lapin Blanc, Octave passe à travers le miroir, et se retrouve sur les plateaux de tournage où il prend conscience de la Vacuité du Monde dont il est en partie l’architecte. Quoi de plus artificiel que la famille modèle (danoise ?, suédoise ?) utilisée pour vendre un produit insignifiant ? Quoi de plus trompeur que de prendre une call-girl pour incarner une ménagère de moins de 50 ans ?
Comme Néo dans Matrix (informaticien dans un monde informatique), il se rend compte que les manipulateurs sont aussi des marionnettes qui n’ont aucune prise sur leur vie réelle.
La double fin, si décriée par certains, est une idée particulièrement brillante. Elle montre l’illusion du retour à une ‘vie naturelle’, telle qu’elle a été implantée dans notre subconscient. Le nouveau Robinson, isolé de sa communauté, ne peut qu’aller de déboires en déboires, loin des images paradisiaques confortées par la publicité.
Le mauvais accueil critique de la plupart des médias installés, et de bon nombre d’internautes conformistes, n’est donc pas très étonnant. En son temps "Tout le Monde il est Beau, Tout le Monde il est Gentil" de Jean Yanne avait déjà subi le même style de critiques négatives en s’attaquant de façon corrosive aux milieux médiatiques.
Le contexte est certes un peu daté. De nos jours, le Pouvoir n’est plus chez les fabricants (de yaourts ou autres produits), mais chez les distributeurs (grandes surfaces ou médias audiovisuels). "La Vérité Si Je Mens 2" était dans ce domaine beaucoup plus actuel.
Le fond du problème n’a malheureusement fait que s’aggraver ces dernières années. En industrialisant des procédés plutôt artisanaux, et en analysant de manière toujours plus scientifique le comportement, les motivations et la psychologie des rats de laboratoires que sont les consommateurs, on se dirige de façon de plus en plus certaine vers un monde totalement manipulé à la Fahrenheit 451.
On peut donc remercier Arte et Canal+ pour avoir eu le courage de financer ce futur film-culte, qui ne passera sans doute jamais sur TF1. Ça serait mauvais pour la rentabilité du 'temps de cerveau disponible'.
Note : 9/10
Compléments :
> Le site du film.
> Les critiques de CommeAuCinéma, Excessif, FilmDeCulte, Fluctuat, iMedias (1), iMedias (2), KrinEin.
> Sur les blogs: CriticoBlog, LaSenteurDeL'Esprit, BuzzLine, CultureCafé.
20:00 Publié dans Ecrans Larges, Ethiques & Politiques, Humour | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, actualités, médias | Imprimer
06/10/2007
Films de Rentrée 2007
Après les 'blockbusters' de l'été, plutôt mauvais à l'exception des dessins animés et des films asiatiques, la rentrée est l'occasion de découvrir les petits films qui ont fait le bonheur des festivals au printemps.
"Caramel" (8/10) : Venus Beauté Institut au Liban. Une galerie de portraits bien représentatifs de la complexité de la société libanaise, vue comme un microcosme de la vie en général. Une chronique douce-amère, pleine d’espoirs pour les jeunes générations, mais plutôt désespérante pour les plus anciens.
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, Fluctuat, FilmDeCulte, LaSenteurDeL'Esprit).
"Ceux qui Restent" (8/10) : La Mort inspire décidément beaucoup le cinéma français en ce moment. Après "La Tête de Maman" et "Je vais bien, Ne t’en fais pas", c’est au tour d’Anne Le Ny de se pencher sur ‘ceux qui restent’, victimes collatérales de la maladie et des décès. Un premier film parfaitement maîtrisé, des acteurs au top, pour un scénario pas facile qui oscille sur le fil du rasoir. Mais le ton de chaque scène sonne particulièrement juste, avec beaucoup de pudeur et de non-dits, mais pas de faux-semblants.
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, FilmDeCulte, LaSenteurDeL'Esprit).
"Sicko" (7/10) : Le Poids des Maux, le Choc des Brûlots. Nouveau menu pour le Big Mike: les assurances-maladie de ses concitoyens. Comme d’habitude, il ne faut pas s’attendre à un réquisitoire en règle, précis et argumenté, mais à une prise à partie émotionnelle et très approximative, effectuée avec la légèreté d’un éléphant dans un magasin de porcelaine. Malgré tous ses défauts, l’exercice est salutaire pour dénoncer les dérives d’un système médical où il vaut mieux tuer les patients pour maximiser les profits et minimiser les recours en justice. Espérons que ce système ne deviendra jamais le nôtre !
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, Fluctuat, FilmDeCulte, KrinEin, DvdCritiques, LaSenteurDeL'Esprit).
"4 Mois, 3 Semaines, 2 Jours" (9/10) : Une Palme d’Or méritée pour une tranche de vie sans concession, dans la Roumanie de Ceausescu (mais ça pourrait sans problème se passer ailleurs). Deux excellentes actrices interprétant 2 personnages aux antipodes l’une de l’autre. Autant Ottila est responsable, déterminée, débrouillarde, compassionnelle, autant Gabita (dont le nom Dragut est d’origine ottomane) est passive, infantile, versatile, dépendante, égocentrique. Deux façons de vivre et de prendre en main son destin. Mais combien de personnes, dans notre Europe prétendument si libre et développée, choisissent de ressembler à cette dernière ?
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Telerama, Excessif, FilmDeCulte, SebInParis).
"L'Ennemi Intime" (8/10) : Amour/Haine, passions meurtrières, divorce sanglant.
Les films français sur la Guerre d’Algérie ne sont pas encore si courants. Une bonne raison d’aller le voir, en plus de la qualité du scénario, de l’interprétation, et de la mise en scène. "L’Ennemi Intime" est le pendant de films comme "Platoon", "Outrages" ou "La Bête de Guerre". Métropolitains comme autochtones, jeunes appelés comme anciens de la 2-ième Guerre Mondiale sont amenés à prendre des décisions qu’ils voudraient rationnelles, mais ne sont en fait qu’imposées par les circonstances. Le héros d’hier (résistant, ancien combattant, …) devient le salaud du moment (tortures, massacres, mutilations, napalm, …), les anciens compagnons d’armes se livrent à une guerre fratricide, en basculant soit d’un côté, soit de l’autre. Le récit est beaucoup moins manichéen que ne le voudraient certaines critiques, ce qui le rend indispensable, et certainement plus utile pour la formation des jeunes que la lecture de la lettre de Guy Moquet.
(Voir critiques sur CriticoBlog, CommeAuCinéma, Afrik, Excessif, Fluctuat, FilmDeCulte, KrinEin, PibeSan, AgoraVox, SkyMaster21).
20:00 Publié dans Ecrans Larges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma | Imprimer