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26/01/2006

Brûlez Rome (Urite Romam)

Caveant consules …

… ne quid detrimenti respublica capitat (Que les consuls prennent garde, afin que la république n’éprouve aucun dommage).
Cette formule était prononcée par le sénat romain, lorsqu’il accordait aux consuls les pleins pouvoirs dans les moments de crise. Il est amusant de constater que l’Histoire se répète souvent, mais que les leçons du passé sont souvent oubliées, notamment par ceux censés être en charge de la 'chose publique'.

Rome sous Néron.
La ville est un melting-pot de citoyens, d’esclaves, d’affranchis, d’étrangers avec une hiérarchie complexe et très inégalitaire. Selon son origine, sa naissance, sa richesse, ses relations, son âge et son sexe, on a une vie qui va de la puissance absolue à la misère la plus profonde. Les classes dirigeantes vivent dans un luxe inouï. Les esclaves n’ont absolument aucuns droits, ni pour eux, ni sur leur famille. Les vrais citoyens ne s’en sortent pas trop mal, grâce à la richesse de l’Empire, et la politique du "pain et des jeux du cirque". L’ascenseur social reste néanmoins possible pour certains dans les secteurs à risque (commerce, armée, vigiles, gladiateurs, …).
En 61, suite à l’assassinat d’un préfet par un esclave, le sénat a fait exécuter 400 d’entre eux à titre d’exemple, les affranchis de ce préfet n’échappant à la mort que grâce à la clémence de Néron, en conflit ouvert avec les sénateurs. Pendant les délibérations, il vaut mieux pour eux de raser les murs pour échapper aux contrôles de police.
En juillet 64, l’été est chaud, le vent tourbillonnant. La ville est périodiquement victime de tensions sociales, de rixes, d’émeutes, de départs de feux accidentels ou allumés par des spéculateurs immobiliers. La ville est en grande partie détruite, malgré les efforts des vigiles (pompiers) et de l’empereur qui accourant de sa villa d’Antium, fournit aides et refuges aux sans-abris.
Les 'racailles' de l’époque en profitent pour piller la ville, et pour apaiser les esprits de ceux pour qui seule compte la manière forte, on accuse un groupe religieux minoritaire (une secte originaire de Palestine) dont les coutumes heurtent le 'sens commun'.

Toute ressemblance avec des situations récentes n’est sans doute pas une coïncidence.
Quand des parlementaires réclament des peines collectives maximales envers des minorités visibles accusées de pillages, mais maintenues dans une position politique et économique très en dessous des autres classes de la société, on se dit qu’en 20 siècles, on a pas beaucoup avancé.
La politique du bouc émissaire n’a également pas vraiment changé. On a seulement remplacé les chrétiens par les musulmans, les caves des immeubles remplaçant les catacombes comme seuls lieux de culte possibles.
Il est également assez cocasse de voir la polygamie, certes illégale, considéré comme une des causes du sous-développement de ces minorités, alors qu’on glorifiait dans le même temps le règne de François Mitterrand, ses maîtresses et sa fille adultérine.

O tempora! O mores!

Note : 8/10

Compléments :
> L’émission de France5 diffusée en décembre 2005.
> La fiche du film et le contexte historique.
> L'incendie de Rome.
> La fiche du DVD zone2.
> The French Democracy: les émeutes dans les banlieues françaises fin 2005, vues de l'intérieur.

05/08/2005

Le Destin

Ombres et Lumières à la veille de la Renaissance occidentale

« La pensée a des ailes, nul ne peut arrêter son envol ».

En ces temps d’intolérance patriotique et religieuse, il est parfois bon de revenir sur notre passé.
C’est ce que fait dans certains de ses films Youssef Chahine, cinéaste égyptien francophone, né dans le creuset cosmopolite qu’est Alexandrie, et parfois interdit par les censures islamistes ou gouvernementales.

Dans "Le Destin" (1997), il reconstitue une tranche de vie du philosophe, juge et médecin Averroès (1126-1198), un des plus grands penseurs du 12-ième siècle, commentateur de l’œuvre d’Aristote, sage, érudit, généreux, bon vivant.
Formaté comme une comédie musicale de style 'Bollywood', le film profite des intermèdes dansés et chantés pour souligner ce côté chaleureux et humain du personnage.

L’action se passe en Andalousie, riche province de l’empire almohade (où cohabitent paisiblement musulmans, juifs, chrétiens, gitans), à une époque où les royaumes catholiques nord-européens vivent dans la crasse, l’ignorance et la misère.
Une période où les bûchers se multiplient pour éliminer les ‘hérétiques’ coupables d’avoir professé des idées contraires aux dogmes du Vatican.

C’est un film grave, où obscurantistes de tout poil (Inquisition ou groupes islamistes) font tout pour subvertir les consciences, et pour éliminer toute opposition rationnelle via les mouvements de foules et les autodafés.
C’est l’occasion de montrer comment un jeune homme moralement faible et désœuvré, vivant sans perspectives d’avenir, peut se faire endoctriner par des intégristes prêts à tout pour prendre le pouvoir.

Dans ce contexte, Averroès, tel Gandhi ou Martin Luther King, prône l’amour du prochain, la tolérance et le partage, seules solutions pour une coexistence pacifique et mutuellement enrichissante.
Pour lui, philosophe des lumières avant la lettre, la connaissance universelle, la science, les arts sont un remède à la haine, le rigorisme, le fanatisme, l’obscurantisme.
Il refuse le fatalisme, et enseigne que chacun peut être maître de sa destinée, en forgeant son caractère et sa morale aux feux de la connaissance.

En bref, un film moderne, entraînant, réaliste, militant, qui bien que n’étant pas non plus une parfaite reconstitution historique, est assez loin des clichés véhiculés dans le "Kingdom of Heaven" de Ridley Scott (ah! ces arabes qui apprennent des occidentaux comment creuser un puit, ça m‘a fait beaucoup rire).

> Fiche Cinéfil

03/08/2005

Jésus de Srinagar

ATTENTION : Intégristes s’abstenir.

Christ Files: la vérité n'est pas toujours là où l'on croit

L’ésotérisme semble revenir à la mode.
Le "Da Vinci Code" s’est vendu par milliers, bien qu’étant d’une qualité littéraire très moyenne.
Pour ceux qui ont été fortement déçu par sa lecture, il existe beaucoup mieux : les romans de Gérald Messadié.

Cet auteur, par ailleurs journaliste scientifique et catholique pratiquant, ne s’est jamais satisfait des incohérences dont sont truffées la Bible et ses exégèses ecclésiastiques.
Poussé par sa curiosité, et suivant une démarche d’historien, il s’est plongé dans les textes canoniques (approuvés par le Vatican) ou apocryphes (rejetés par l’Eglise seulement au 5-ième siècle) toujours acceptés dans les autres traditions chrétiennes (orthodoxe, copte, syriaque, …).
Il a aussi plongé son nez dans les textes hébraïques, hindous, bouddhistes, les manuscrits de la Mer Morte (retrouvés en nombre dans la 2-ième moitié du 20-ième siècle), ainsi que dans les ouvrages des ‘archéologues bibliques’ anglo-saxons (protestants), moins timorés dans ce domaine que les universitaires de confession catholique.

Après quoi, en bon historien, il en a tiré la substantifique moelle, dégageant les faits incontestables, écartant les incohérences, choisissant entre 2 hypothèses celle qui était la plus plausible, puis il a écrit des romans historiques particulièrement passionnants, sans plaquer sur son texte de suspense artificiel ou d’amourette à l’eau de rose.

Si l’on prend par exemple son "Jésus de Srinagar", le texte de 400 pages est complété par 94 pages de notes où il indique ses sources et ses choix, ainsi que par 6 pages de bibliographie pour ceux qui voudraient contrôler ses dires par eux-même.
On est loin de la bluette de Dan Brown !

A part ça, quel en est le sujet, me direz-vous ?
Rien de moins que la vie de Jésus depuis sa crucifixion en 30 ou 33 à Jérusalem, jusqu’à sa mort à Srinagar (Cachemire) de nombreuses années plus tard.
On vous avait appris qu’il était mort sur la croix ?
Eh bien, désolé ! Il va vous falloir réviser vos classiques et ne plus croire bêtement ce qui est raconté au catéchisme.
De toute façon, que vous acceptiez ou non les explications de Messadié, son texte est un extraordinaire roman, qui fait formidablement bien revivre le premier siècle de notre ère.
Du marigot politico-religieux existant dans la Palestine sous domination romaine, aux civilisations indiennes marquées par le bouddhisme originel, en passant par les caravanes des routes de la soie, c’est un réel plaisir de suivre Jésus confronter ses doutes et sa foi aux autres religions de l’époque.

S’il est vrai que « la vérité est ailleurs », elle n’est certainement pas cachée dans les toiles de Leonardo.

Compléments:
> Jésus et les Esseniens
> Jesus en Inde
> Jesus au Cachemire
> Les années 'perdues' de Jesus

17/07/2005

Carnets de Voyage

¡Hasta la victoria siempre!

Quoi qu'en disent certains, ce film n'est pas un simple récit de voyage avec de beaux paysages et des indigènes charmants, sponsorisé par les offices du tourisme locaux.

Certes, il donne envie de partir, et de mieux connaître et comprendre la réalité de l'Amérique Latine.
Mais il n'est pas anodin que les 2 voyageurs soient Ernesto Guevara et Alberto Granado.
C'est d'abord et avant tout un récit initiatique.
Celui d'un jeune bourgeois argentin, étudiant en médecine, non politisé, qui pour se changer les idées et rejoindre sa belle au Venezuela décide de jouer les routards et de faire le chemin sur une veille moto rafistolée, avec un copain d'un milieu plus populaire mais aussi superficiel que lui.

Le problème est qu'en chemin, ils vont être amenés à faire tout un tas de rencontres qui vont changer leur vie à jamais.
Celles de paysans exploités par de grands propriétaires terriens, de mineurs traités comme des esclaves, d'indiens traités comme des sous-hommes, de lépreux relégués à une non-existence en marge de la société.
En subissant comme eux la faim, le froid, le racisme, le mépris des classes dirigeantes, ils vont prendre conscience de la futilité de leur vie antérieure (l'insouciance, la bohème, la drague facile, ...) et s'engager dans ce qui sera le combat de leur vie...

Ceux qui n'ont pas compris pourquoi un petit étudiant en médecine sans histoires est finalement devenu 'el Commandante Che Guevara', nouveau Don Quichotte juste et intègre, trouveront ici matière à réflexion, même s'ils ne partagent pas les idées politiques que finira par épouser Guevara.

Le tout est filmé de façon très simple, sans pathos, sans effets spéciaux inutiles, avec des acteurs parfaits dans leurs rôles.
En résumé: un grand film pour mieux comprendre la genèse d'un grand homme qui est allé jusqu'au bout de son idéal.
A voir absolument.

PS: Bon, si vous êtes un lepéniste convaincu, et que vous croyez que l'homme DOIT être un loup pour l'homme, ce n'est peut-être pas la peine d'y aller !
Dans ce cas, regardez plutôt "Hitler, la naissance du mal", qui montre comment un autre jeune homme, obscur peintre raté, bascule du côté obscur en laissant sa haine et son cynisme prendre le pas sur lui.
C'est tout aussi instructif !

> Fiche Cinéfil