Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/01/2006

The Constant Gardener

Bon Diagnostic, mais Traitement Placebo

Sur le papier, ce film aurait pu être un chef-d'oeuvre.
Un scénario de Jeffrey Caine ("GoldenEye") d'après un roman de John LeCarré ("L'espion qui venait du froid"), Fernando Meirelles ("La Cité de Dieu") à la réalisation, Ralph Fiennes ("La Liste de Schindler"), Rachel Weisz ("La Momie"), Hubert Koundé (le black de "La Haine"), Pete Postlethwaite, etc., à priori rien que du bon.
Pourtant en sortant de la salle, on a comme un goût d'inachevé, de 'aurait pu mieux faire'.

Ce n'est pas la faute des interprètes, tous excellents des premiers rôles aux plus obscurs figurants.
Ni celle de F.Meirelles qui nous fait voir une Afrique bien réelle, les bidonvilles miséreux et les hôpitaux lépreux, les golfs biens arrosés et les 'party' de la bonne société, le travail ambiguë des diplomates, des ONG, de l'ONU, des labos pharmaceutiques, ...
La construction du film en 2 parties égales n'est pas non plus à mettre en cause. Elle apporte une respiration au récit qui dure quand même plus de 2 heures, et met bien en évidence l'état d'esprit du 'héros' de l'histoire.
D'abord son 'innocence', sa neutralité passive, sa volonté de ne rien voir, ne fâcher personne, ne pas s'impliquer dans la situation, de seulement 'cultiver son jardin' en gentleman bien sous tous rapports.
Ensuite sa prise de conscience, sa révolte, ses compromissions même (mensonges, faux papiers, ...), sa quête de la vérité, la redécouverte de sa femme et la sublimation de son amour pour elle ('Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé').

C'est plutôt dans le scénario que le bât blesse.
Là où "Lord of War" accumulait les faits et les données fournis par la personne la mieux informée (le trafiquant), "The Constant Gardener" est d'abord traité comme une 'love-story' très hollywoodienne décrite par le cocu de l'histoire, celui qui n'a rien vu et rien compris.
On survole alors complètement la partie sérieuse du sujet, et on passe à côté du superbe thriller politico-économique qu'il aurait pu être ! Il parait pourtant que cette histoire est tirée de faits réels, et on aurait aimé en savoir beaucoup plus.
Certaines ficelles sont même parfois un peu grosses (la lettre écrite par le principal responsable de l'affaire, la paranoïa des militants humanitaires qui font pourtant aveuglément confiance aux institutions diplomatiques, ...).
C'est dommage, car encore une fois tout le reste était vraiment excellent.

Note: 6/10

> Fiche Cinéfil

Compléments :
> Article Afrik.com
> Le livre de John LeCarré qui semble être à l'origine des faiblesses du scénario

04/01/2006

Lord of War (Vendre des armes est un business comme un autre)

Economie de Marché (gris) et Libre Entreprise

Tous ceux qui ont vu "Le Cauchemar de Darwin" en sont un peu restés sur leur faim.
On y voyait le résultat d'une politique néo-colonialiste européenne sur le terrain africain, avec livraison d'armes en échange de l'exploitation intensive des ressources piscicoles tanzaniennes. L'auteur y interviewait les pilotes des pays ex-soviétiques, les prostituées locales, les gamins des rues, les pêcheurs exploités, les officiels satisfaits, etc. Une seule catégorie d’acteurs manquait à l’appel : les trafiquants d’armes responsables de ce nouveau 'commerce triangulaire'.

Andrew Niccol ("The Truman Show", "Gattaca") s’est penché sur le problème et nous livre ce qui s’apparente plus à un docu-fiction qu’à un 'blockbuster' hollywoodien. Ce film n’a d’ailleurs pu voir le jour que grâce à des capitaux européens et bénéficie du soutien d’Amnesty International.
Ici, pas de 'Happy End'.

Yuri Orlov (Nicolas Cage) est le prototype de ces individus amoraux pour qui, entre le blanc du légal et le noir du franchement illégal, il existe une zone grise où tout est permis du moment qu’il y a des dollars à gagner.
Dans ce domaine on trouve la contrebande de cigarettes ou d’alcool, le passage ou l’emploi de travailleurs clandestins, la défiscalisation des profits (honnêtes ou pas), la gestion de pavillons de complaisance, de casinos, ou toute autre activité dont la légalité dépend surtout de l’endroit où on la pratique.
Les guerres, civiles ou entre états, ont toujours été propices à ce genre d’activités, permettant de faire fortune rapidement du moment qu’on n’a pas trop de scrupules.

Techniquement, il ne s’agit que d’import-export, achetant ici des stocks de matériels présents en trop grand nombre, pour les revendre là où les besoins des consommateurs solvables ne sont pas suffisamment satisfaits.
La doctrine libérale pure et dure défendue par les conservateurs américains, appliquée à un produit de grande série (la kalachnikov), géré comme des canettes de cola ou des rasoirs jetables.
Comme le dit notre 'héros' dans son argumentaire marketing : 'une personne sur 12 est armée sur cette planète, la seule question est de savoir comment armer les 11 autres'.

Yuri Orlov ne diffère pas des membres de la NRA ('National Riffle Association', présidée par Charlton Heston [1]), pour qui la possession d’une arme de guerre est un droit constitutionnel.
Rappelons également que :
- les 5 plus grands fabricants d’armes (USA, France, GB, Chine, Russie) sont membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU.
- la famille Bush tire une grande partie de sa fortune du commerce des armes et du pétrole [2].
- en France, les principaux producteurs d’armes du secteur privé (Lagardère, Dassault) font partie du gotha politique et sont propriétaires de grands empires médiatiques.
Rien d’étonnant donc à ce que la trafic d’armes continue à proliférer, et que la morale s’efface toujours devant des profits aussi juteux, avec des excuses comme 'ça n’est pas notre guerre', ou 'il faut sauvegarder l’emploi dans nos industries d’armement' (théoriquement censées garantir notre indépendance nationale).

Yuri Orlov, tout comme Tony Montana (Al Pacino) dans "Scarface", ne fait que prétendre à sa part du grand rêve américain, où tout héros positif est jugé sur sa capacité à entreprendre, et où sa respectabilité se mesure à l’importance de son compte en banque.

"Lord of War", en présentant l’irrésistible ascension d’un petit trafiquant amené à fréquenter les plus grands, est donc un film réaliste, touchant, certainement cynique dans son propos, mais assez révélateur d’une idéologie où les règles du commerce priment toujours sur les aspects moraux de la société [3][4].
La même démonstration pourrait être faite sur le saccage écologique de la planète [5], ou les délocalisations à outrance vers des pays ne respectant pas les Droits de l’Homme [6].

En bref : un très bon film, salutaire, servi par de très bons acteurs, mais qu’il ne faut pas aller voir le jour où on a un gros coup de blues.

Note: 9/10

> Fiche Cinéfil

A voir également sur le sujet :
[1] "Bowling for Columbine" de Michael Moore (le problème des armes aux Etats-Unis)
[2] "Le Monde selon Bush" de William Karel (la famille Bush et le 11 septembre 2001)
[3] "The Constant Gardener" de Fernando Meirelles (les agissements des sociétés pharmaceutiques)
[4] "Révélations" de Michael Mann (les agissements des fabricants de cigarettes)
[5] "The Corporation" de Jennifer Abbott (documentaire sur la responsabilité des entreprises en tant que personnes morales)
[6] "The Big One" de Michael Moore (les délocalisations des entreprises et la course au profit)

08/12/2005

Saw

Not to be Seen

Quel est la différence entre un bon et mauvais film, notamment quand il y a une grosse surprise à la fin ?
C'est que le bon ("Se7en", "6ième Sens", "Les Autres", "L'Armée des 12 Singes", ...), on le voit et revoit même quand on connaît la chute.
Ca n'est pas le cas de "Saw", qui surfe sur la mode de films comme "Se7en", "Cube", "Le Projet Blair Witch", ...

Pour avoir une idée de TOUS les défauts de ce (mauvais) film, le mieux est d'aller voir sur cet avis publié dans DvdRama (je ne pourrais pas dire mieux que cette critique, que je partage entièrement).

Mieux vaut oublier ce film et son DVD, et (re)voir plutôt "Se7en". Les originaux sont toujours meilleurs que les copies.

Note: 2/10

> Fiche Cinéfil

Compléments:
> Sur le blog de "LaBulleDuSiècle".

28/09/2005

Les Ames Grises

Fondu Enchaîné vers un monde de Grisaille

Un film superbe, intelligent, roublard, sans ‘héros’ bien défini et dont le point de vue du spectateur change au cours de la progression du récit, servi par des acteurs toujours excellents: Jean-Pierre Marielle, Jacques Villeret (un de ses derniers rôles), Denis Podalydès, Michel Vuillermoz, Serge Riaboukine, ...

Au début, les choses sont claires, les rôles bien tranchés.

Dans un village près de la ligne de front, riches bourgeois et pauvres ouvriers se côtoient sans se mélanger, tandis que des soldats malgré eux sont envoyés à l’abattoir pour nourrir l’offensive en cours.
Selon sa sensibilité politique, on s’attachera plutôt aux prolétaires exploités par les notables, ou à ces esprits éclairés et cultivés tentant de gérer au mieux leurs troupeaux abrutis par le travail et l’alcool.
Le maire, l’institutrice, le procureur, le juge d’instruction, le flic, le curé, la bonne, l’aubergiste, les permissionnaires permettent de tracer rapidement les caractéristiques de cette société d’avant guerre (la première), aujourd’hui désuète, où tout le monde semble ‘à sa place’, y compris un assassin promptement ‘raccourci’ pour avoir eu un coup de sang, proprement inadmissible dans un monde si ‘bien comme il faut’.
Seule tâche dans l’ensemble, le juge d’instruction ostracisé pour avoir côtoyé des nègres, lors de son précédent poste en Afrique.

Mais la vie ne peut se décrire en n’utilisant que le noir et le blanc.
La guerre est là qui s’introduit partout, brasse les populations, remet en cause les habitudes bien établies, révèle les caractères et noie les âmes dans une brume grise.
L’Enfer n’est-il pas dans ce mélange des couleurs, où la pureté des extrêmes se corrompt en heurtant ‘le bon goût’ ?
Est-on bien sûr que ce juge si zélé est bien le défenseur intègre de la veuve et de l’orphelin ?
Et ce procureur, que la rigidité morale, le veuvage et la haine du ‘vulgaire’ isole dans son château, est-il le pervers qu’il semble être quand il s’attarde avec une jeune femme, ou caresse la joue d’un enfant ?
L’aubergiste si sympathique et si dur au travail ne profite-t-il pas du charme de sa fille pour attirer sa clientèle ?
Les déserteurs ne sont ils que des pauvres hères dépassés par les événements et victimes d’officiers sadiques ?

Seul les anti-héros (l’institutrice, le flic, sa femme enceinte), âmes innocentes qui ne font que subir les aléas de l’existence, semblent posséder effectivement les qualités morales d’une vraie humanité.
Mais est-ce suffisant pour affronter les duretés de la vie ?
Où est-il préférable d'abandonner le combat ?

Note: 9/10

> Fiche Cinéfil

31/08/2005

Bombon el perro (Bombon le chien)

2 Vies de chiens, mais pas de niches entre eux

L’un survit comme il peut, avec toute la bonté qui le caractérise.
Laissé sur le bord de la route par la crise économique, abandonné par sa femme depuis des années, il vit de la charité de sa fille et de petits boulots, au gré de ses rencontres avec d’autres compagnons d’infortune.
Son seul plaisir, dont il aimerait tirer profit, est la fabrication de manches de couteaux sculptés.
Mais, pas facile à vendre dans une Argentine ruinée par le FMI (voir à ce sujet l'excellent documentaire "Mémoire d'un saccage").

L’autre ne s’est pas remis de la mort de son maître.
Aristocrate au pedigree prestigieux, destiné à être le premier d’une longue lignée (disparue en même temps que le propriétaire du chenil), il laisse s’écouler le temps, indifférent à tout même aux femelles en chaleurs tortillants leur cul sous son nez.

Deux laissés pour compte de la société qui n’auraient jamais dus se rencontrer sans une série de coups de chance providentiels.
Petit à petit, chacun apprivoise l’autre et l’espoir d’une vie meilleure se profile.
Sera-ce l’or des trophées et la gloire des podiums, ou plus simplement l’amour et la joie de vivre retrouvés au détour du chemin ?
Le profit doit-il primer sur tout, quitte à se leurrer avec des faux-semblants ?
Les sentiments ne deviennent ils pas évident au moment de la séparation ?

Vous le saurez en visionnant ce film qui a du chien, et laisse pas cabotiner ses acteurs.
A recommander à tous ceux qui n’ont pas peur de se laisser mordre par l’émotion.

> Fiche Cinéfil