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24/02/2007

Le Dernier Roi d'Ecosse (The Last King Of Scotland)

Le Dernier Roi d'EcosseLa Dernière Colonie Britannique ?

"Le Dernier Roi d’Ecosse" est la rencontre improbable entre un médecin occidental idéaliste, et un des nombreux dictateurs mis en place au moment de la décolonisation.
Mouvement de repentance ou bon filon marketing ?, le cinéma aime bien l’Afrique depuis quelques temps. Mais au-delà du souvenir, peu de choses semblent avoir changé dans les anciennes colonies.

La période de la Guerre Froide avait été propice aux coups d’états destinés à mettre au pouvoir des hommes favorables à tel ou tel camp, sans se soucier beaucoup du respect des valeurs officiellement défendues par l’ONU et nos démocraties.
Idi Amin Dada, Bokassa, Mobutu, Pinochet, Duvalier, le Shah d’Iran, Saddam Hussein, entre autres, ont pu bénéficier du support sans faille de la CIA, du KGB, du MI6 ou du SDECE. Beaucoup ont sombrés dans les oubliettes de l’Histoire. Certains s’accrochent encore à leur fauteuil ou ont passé le relais à des dauphins tout aussi sanguinaires (Bongo, Ben Ali, …).

Paradoxalement, les leçons du passé ne semblent pas avoir beaucoup servi. Si la CIA et le FSB continuent à vouloir imposer les vieilles (mauvaises) méthodes de l’ingérence directe (Irak, Tchétchénie, …), les autres pays n’ont pas renoncé à vouloir installer leurs gouvernements fantoches. Mais, touché par les restrictions budgétaires, les gouvernements tendent à utiliser de plus en plus les méthodes du privé. Armées de mercenaires, éminences grises venant du FMI ou de la Banque Mondiale, services publics pris en charge par des multinationales, les méthodes changent mais l’esprit colonial reste. Au risque de susciter les mêmes réactions violentes qui se sont toujours produites en pareil cas (guérilleros communistes, intégristes religieux, nationalistes fascisants). Alors qu’une coopération équitable et bien comprise permettrait de valoriser les intérêts des 2 partenaires, en tendant vers un équilibre démocratique et pacifique comme celui mis en place dans la Communauté Européenne.

"Le Dernier Roi d’Ecosse" est donc un bon moyen de se souvenir d’une époque pas si lointaine. Mais il est loin d’avoir la force de films plus ancrés dans la réalité comme "Syriana" ou "Lord of War". C’est en tout cas le symptôme d’une mauvaise compréhension de l’Occident face au Tiers Monde, de ses aspirations et de ses conditions de vie. L’Occident est bien ce jeune homme naïf qui arrive en Afrique sans la connaître, est plus préoccupé de la satisfaction de ses désirs que des besoins de la population, et se réveille un jour avec la gueule de bois en se demandant comment cela est arrivé.
A voir pour l’ambiance qui s’en dégage, le très bon jeu des acteurs, la musique excellente bien que pas toujours d’époque (pourquoi Tony Allen et pas Fela ?) et l’ébauche de réflexion que ça pourra éventuellement initier chez certains.

Note: 8/10

Compléments :
> Le site du film.
> Les critiques sur "Afrik", "CommeAuCinéma", "Telerama", "iMedias", "Fluctuat", "EcranLarge", "AvoirAlire", "Canoe", "KrinEin".
> Sur les Blogs: "AgoraVox", "CulturoFil", "LeChatPerçant".

17/01/2007

12h08, à l’Est de Bucarest (A Fost Sau n-a Fost ?)

12h08, à l'Est de BucarestA l’Est, Rien de Nouveau.

12h08, le 22 décembre 1989. Ceausescu essaie de fuir Bucarest en hélicoptère, filmé en direct par la télévision, et finit par être capturé par ceux que les medias et l’Histoire officielle qualifieront de 'révolutionnaires'. Mais la 'Révolution' annoncée a-t-elle vraiment eu lieu ?
C’est la question que pose, 16 ans plus tard, l’animateur/propriétaire d’une minuscule chaîne de télé locale aux 2 seuls 'témoins' de l’époque qu’il a réussit à convaincre de passer à l’antenne.
En 2 temps, 3 mouvements, Corneliu Porumboiu arrive, avec un manque de moyens évident, à faire un bilan de la Roumanie d’aujourd’hui, englué dans la misère et la débrouille, et à pointer du doigt toutes les manipulations effectuées sur ce qui est censé être une vérité historique. Plans fixes très 'documentaires', épisodes de la vie de tous les jours, dénonciation du racisme ordinaire, humour caustique et scènes touchantes se mélangent pour donner un de ces films qu’on a plaisir à voir.

Après la longue nuit communiste, arrive une matinée symbole d’espoir. Les réverbères blafards cèdent petit à petit la place à un soleil prometteur. Les hommes émergent du sommeil comateux occasionné par leur cuite de la veille, pendant que les femmes s’affairent et commencent à préparer Noël. Mais la paye du mois disparaît vite dans le règlement des dettes en cours, ne laissant pas beaucoup de choix à la population.

La préparation de l’émission télé est l’occasion de faire une revue du microcosme local, très marqués par le Destin. Aux gamins désoeuvrés, ne pensant qu’à faire éclater des pétards, succèdent les ados incultes et sans avenir, dont les seules connaissances historiques se résument à une Révolution Française fantasmée, et dont la seule activité sérieuse concerne le trafic de produits occidentaux. Les jeunes adultes sont soit partis à l’Ouest, soit subissent les diktats de leurs aînés, imperméables aux méthodes modernes. Les 'responsables', pleins d’illusions, croient encore que changer les hommes suffit pour changer le système, pendant que les 'anciens', sclérosés et désabusés, essaient de se raccrocher aux bons souvenirs de l’ancien temps.

Là ou pas là ?Le dernier acte, l’après-midi, est réservé aux choses 'sérieuses'. Pendant que les femmes continuent à trimer, les hommes débattent gravement de la Révolution passée. Au gré des questions orientées, des témoignages vantards et des règlements de compte téléphoniques, apparaît petit à petit la réalité de la situation roumaine, dans laquelle gagnants et perdants d’aujourd’hui sont exactement les mêmes qu’hier. Et la nuit retombe sur la ville, toujours aussi peu éclairée par quelques réverbères tremblotants.

Note: 8/10

Compléments :
> La Fiche du film sur Wikipedia.
> "Destination Ubucarest": reportage à l'occasion de la sortie du film à Bucarest sut Telerama.
> Critiques sur "CommeAuCinéma", "Arte", "LaLibreBelgique", "LaTribune", "Telerama", "iMedias", "FilmDeCulte", "AVoirALire", "ChronicArt".
> Sur les Blogs: "Niklas", "FinDeSéance", "AcideCritique", "CritiquesClunysiennes", "CosmopolitanStories", "IDEA".

07/01/2007

10 Canoës, 150 Lances et 3 Epouses (Ten Canoes)

10 CanoesÉloge de l’Équilibre dans un Monde Incertain.

Comme beaucoup de peuples 'premiers', les aborigènes ont une culture complètement orale, et condamnée à disparaître en même temps que les anciens qui la conservent et la transmettent aux générations suivantes. Peu d’entre eux ont eu l’occasion de mettre en œuvre des moyens modernes compatibles avec leurs traditions. Ça a été le cas des Inuits, il y a quelques années, avec "Atanarjuat" (2002), et des Nenets avec "Sept Chants de la Toundra" (2000). On peut également citer certains films d’ethnologues comme Jean Malaurie ("Les derniers Rois de Thulé", 1970) ou Robert Flaherty ("Nanouk l’Esquimau", 1922). A l’inverse, peu de peuples indiens ont eu l’occasion de montrer la réalité de leur culture, sans le prisme déformant d’équipes de réalisations occidentales à but commercial. Le film de Rolf De Heer est donc un évènement particulièrement bienvenu.

L’histoire commence comme celle de "Shrek" ('Il était une fois un marais perdu très très loin d’ici, …'). Mais ici pas de conte de fées. Les aborigènes du nord de l’Australie sont établis dans ces terres depuis des milliers d’années, et vivent en symbiose totale avec ce milieu difficile. Leurs mythes fondateurs y sont enracinés et ne remontent pas aux périodes antérieures à la colonisation de l’île. Le prologue est très instructif pour présenter à l’occidental moyen les bases de leur culture. Basée sur l’autarcie et une économie de subsistance, tout est fait pour ne pas troubler l’ordre et l’harmonie de la Nature.
Le conte est un moyen d’éduquer les jeunes, de valoriser le modèle social, de résoudre les tensions entre membres du groupe. Organisé en clans ne parlant parfois pas la même langue à quelques kilomètres de distance, les aborigènes ont pour principal souci la survivance de l’espèce, le groupe étant prioritaire sur tout individu.

Danse des LancesAdoptant une forme analogue à celle des "1001 Nuits" (le narrateur raconte une histoire dans laquelle un narrateur raconte une histoire), le scénario remonte le temps pour mettre en exergue les règles indispensables en dehors desquelles la vie en société ne serait plus possible. Polygamie, amours impossibles, sorcellerie, chasse, guerre, rites funéraires sont évoqués sans fard autre que celui des peintures corporelles traditionnelles. Le temps s’écoule lentement, le récit s’interrompant quand il le faut pour s’occuper de choses 'sérieuses' [*]. Et c’est dans la durée que les choses importantes émergent, une fois décantées de la futile agitation du monde.

En bref, un très bon docu-fiction, très respectueux de la culture aborigène, et à voir absolument par tous ceux qui sont sensibles à la magie d’histoires intemporelles.

Note: 9/10

[*] Sur un thème semblable, voir également l’excellent "Voyageur et Magiciens" film bhoutanais dans lequel conte et réalité se mélangent pour mieux démêler indispensable et superficialité.

Compléments :
> La Fiche du film sur Wikipedia.
> Le Site du film.
> Critiques sur "CommeAuCinéma", "LeMonde", "LeFigaro", "Telerama", "Excessif", "Fluctuat", "AVoirALire", "LeRoutard".
> Sur les Blogs: "LesIrréductibles", "CafésGéographiques".

05/11/2006

Danse de GuanYin aux Mille Bras

Kannon aux mille brasChine: 1000 bras pour une tête.

En complément à ma note sur "La Déesse de la Rivière Luo", une superbe vidéo illustrant les danses du Bodhisattva aux mille bras. Ces danses très spectaculaires (si on est dans l'axe) sont assez fréquentes dans le monde chinois (j'en ai vu une récemment à DunHuang, effectuée par une petite troupe provinciale). Celles-ci sont exécutées par la troupe du "China Disabled Person's Performing Art", un ensemble de 21 danseuses/danseurs sourd(e)s-muet(te)s.

Elles représentent le Boddhisattva Avalokitshvara (GuanYin en Chine, Kannon au Japon, Tchenrezi au Tibet), symbole de la compassion, et révéré dans le bouddhisme chinois sous sa forme androgyne ou féminine. Les mille bras sont l'expression des nombreux 'moyens habiles' disponibles pour parvenir à l'Eveil.

La musique et l'éclairage sont assez kitch, comme souvent en Asie, mais la chorégraphie vaut vraiment le coup d'oeil.



Cette video peut également être vu en grand format sur Google Video.

Une autre version sur YouTube, apparemment exécutée pour le "2005 CCTV Spring Festival Gala" en faveur des J.O. de Pékin 2008:


Compléments :
> Des problèmes de plagiats inter-chinois sur cette danse? : C.f. news sur china.org.cn (in english).

21/10/2006

Abd Al Malik: Gibraltar

Abd Al Malik - GibraltarBanlieues Rap et Humanisme Soufi.

Dans le désert culturel organisé par les grandes 'majors' du disque, le Rap reste, avec l’Electro et les musiques 'ethniques', une source de satisfaction pour les amateurs de musiques de qualité. Les conditions de vie difficiles des 'quartiers sensibles' sont en effet un terreau très fertile pour tous les vrais artistes, pour qui l’Art est un combat.

Parmi les personnalités intéressantes émergées récemment, il faut noter Abd Al Malik, fils d’émigrés congolais, ex-racaille de banlieue (mais étudiant brillant), ex-leader des "New African Poets", ex-islamiste engagé (mais pas intégriste), et qui a finalement trouvé sa voie en rencontrant le Soufisme.

Son Rap se positionne dans la continuité de ceux de MC Solaar ou d’IAM, mêlant les influences africaines, arabes et franco-belges dans un métissage à l’image de nos sociétés multiculturelles. Cela n’empêche évidemment pas une critique virulente des travers de nos sociétés, et de ceux qui cherchent à souffler sur les braises. Son dernier album "Gibraltar" est une vraie réussite.

A écouter notamment:
> 1 - "Gibraltar": Un lieu emblématique pour beaucoup d'immigrants. Un lieu de passage et de réflexion, notamment pour un fils d'immigré qui recherche ses racines.

> 2 - "12 Septembre 2001": Le jour d'Après, vu du mauvais côté de la barrière.

> 4 - "Les Autres": Un titre inspiré par Brel, qui revisite et réactualise les problèmes de "ces gens-là".

> 8 - "Le Grand Frère": Exemple d'une intégration réussie jusqu'au bout.

> 11 - "Rentrer Chez Moi": Chroniques ordinaires de la vie de banlieue.


D'autres titres sont disponibles sur RadioBlog.

PS (17/11): Abd Al Malik a remporté hier à l'Olympia le prix Constantin 2006. Il succède à Avril (2002), Mickey 3D (2003), Cali (2004) et Camille (2005). Le concert sera retransmis le 26/11 sur France2 et le 6/12 sur France4. Plus d'excuses donc pour ignorer ce chanteur talenteux.

Compléments :
> Son site.
> Sa bio sur Rap2France.
> L'Agenda de ses concerts sur "Evene".
> Interview à l’occasion de la sortie de Gibraltar.
> Les critiques de "Pinkushion", "KrinEin", "RFI-Musiques".

> Interview sur Telerama à l'occasion de sa tournée 2007.