15/08/2005
Le Singe Nu (Naked Ape)
L’Homme descend du Singe (et vice-versa)
Une des avancées intéressantes de la Science depuis un siècle, a été de remettre l’Homme à sa place dans la 'Création'.
La théorie de l’Evolution de Darwin a été validée et approfondie. La Paléontologie et les analyses ADN ont permis de recréer un arbre généalogique réaliste concernant la filiation des primates et des hominidés.
L’Ethologie (science du comportement animal) a fait de grands progrès concernant les capacités intellectuelles des grands singes.
Certains travaux sur des chimpanzés ont notamment mis en évidence un QI équivalent à celui d’enfants de 5 ans, avec une faculté d’apprentissage importante (maîtrise du langage des sourds-muets, utilisation de machines cybernétiques à grosses touches ou de jeux vidéos avec joystick) ainsi que la capacité à créer de nouveaux mots (du genre ‘pomme’-‘orange’ pour désigner le fruit ‘orange’, ou ‘eau’-‘oiseau’ pour désigner un ‘cygne’) et celle de transmettre leurs acquis à leur progéniture (langage sourd-muet appris aux petits sans intervention de l’homme).
Paradoxalement, ces résultats ont peu souvent servis à analyser le comportement humain.
C’est ce qu’a fait le zoologue Desmond Morris, en 1967-71, dans 3 bouquins (*) qui ont fait sensation à l’époque, mais semblent un peu oubliés depuis.
Quand 99% du code génétique de l’homme et du chimpanzé est commun (d’après les analyses de l’Université d'Etat Wayne à Detroit), il est évident que les comportements de base doivent être très semblables.
Desmond Morris compare donc les hommes aux singes évolués pour mettre en évidence les comportements ‘innés’, ainsi que les réponses stockées au fond de notre cerveau primitif.
Il montre, avec un humour très anglais, comment notre relation avec les autres dépend de notre héritage simiesque, et comment certaines réactions d’amour, haine, peur, dépendance, séduction, … se retrouvent de façon identique chez nos lointains cousins des forêts africaines.
Au final, ces 3 volumes permettent une approche différente et très instructive de la psychologie humaine, trop souvent monopolisée par des spécialistes auto-proclamés (théoriciens du 'psy' ou religieux anthropocentristes).
(*) :
‘Le Singe Nu’ (‘Naked Ape’, 1967) analyse le comportement simiesque de l’individu humain
‘Le Zoo Humain‘ (‘The Human Zoo’, 1969) analyse la vie sociale de l’animal humain
‘Le Couple Nu’ (‘Intimate Behaviour’, 1971) analyse les mœurs sexuelles humaines
PS : les "zob-sédés" pourront sauter directement au 3-ième volume qui contient les pages les plus croustillantes.
Pour les autres, quelques sites web présentant les dernières recherches sur l’intelligence des grands singes :
- http://www2.gsu.edu/~wwwlrc/history.htm (le bonobo Kanzi à l’université de Georgie, Atlanta)
- http://www.friendsofwashoe.org/ (la chimpanzé Washoe à l’université de Washington)
- http://www.gorilla.org/ (la gorille Koko à la Gorilla Foundation)
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10/08/2005
La Guerre des Etoiles (Star Wars)
Jedi : une nouvelle religion ?
Je suis tombé récemment sur des articles de presse rapportant que des fans de Star Wars avaient, lors de recensements, indiqués 'Jedi' dans la case religion du formulaire.
Ils étaient environ 390.000 en 2001 au Royaume-Uni, 70.000 en 2002 en Australie, 20.000 en 2003 au Canada !
Venant venir le coup, le 'Bureau des Statistiques' australien avait pourtant menacé d'une amende de 1000 $ australiens quiconque donnerait de fausses informations. Plutôt cher payé pour se dire 'Jedi' !
Est-ce la preuve du degré de crétinisation des mangeurs de pop-corn en salle obscure, incapables de faire la différence entre fiction et réalité ?
Est-ce un indice du glissement du sentiment religieux des religions traditionnelles vers un comportement sectaire, qui fait croire à n’importe quoi du moment que l’emballage est suffisamment convaincant ?
Ce serait semble-t-il un bon sujet de thèse pour un doctorant en sociologie.
Quelques rappels s’imposent.
D’après George Lucas lui-même, Star Wars est fortement 'inspiré' de la "Forteresse cachée" (1958) de Akira Kurosawa.
La trame de l’épisode 4 (premier de la série) est en effet la même : une princesse au caractère bien trempé fuit une guerre civile, pourchassée par ses ennemis du clan rival, et est aidée dans sa fuite par un preux chevalier et par deux hommes pas très malins attirés par l'argent.
Tout le côté Jedi de la saga est inspiré par le monde samouraï et le bouddhisme zen (le côté Empire relevant plutôt du monde romain et du 3-ième Reich allemand, alors que la République recycle l’imagerie traditionnelle américaine, du western au film de G.I.) :
- Le mot 'Jedi' lui-même vient du japonais 'Jidaï Geki' (drame historique télévisé consacré aux samouraïs).
- La tunique Jedi est un décalque des kimonos de tous les jours.
- L’armure et le casque de Darth Vador sont, ornements en moins, semblables à celle des chefs samouraïs.
- Les combats au sabre laser (simple ou double) sont directement dérivés des techniques de combat samouraï (sabre et lance).
- Les noms des protagonistes (Obi Wan Kenobi, Qui-Gon Jinn, Yoda, …) sont clairement d’inspiration japonaise.
La religion Jedi reprend de nombreux éléments du bouddhisme zen, pratiqués par les samouraïs afin d’avoir une meilleure maîtrise de leur 'art' (la 'voie du sabre').
Dans ce contexte, la relation maître-disciple est très importante. Le rôle du maître n’est pas d’imposer des connaissances à son élève, mais de le guider vers le bon chemin en le soumettant à des épreuves à son niveau lui permettant de progresser. L’élève doit toujours apprendre par lui-même.
L’épisode 5 développe tous ces aspects lors de l’initiation de Luke par Yoda, archétype du moine bouddhiste.
Le pratiquant du Zen doit apprendre à trouver le calme dans son esprit, à ne pas se laisser distraire par des pensées inopinées, à vivre complètement dans l’instant présent, de façon à ne pas se laisser entraîner vers des illusions trompeuses.
Une totale communion avec l’Univers doit alors permettre l’Illumination ou connaissance parfaite de toutes choses.
Dans ce contexte, la 'Force' ressemble beaucoup au 'Ki' des arts martiaux, énergie vitale intérieure et cosmique qui permet au combattant de transcender sa force physique.
Le 'Ki' est notamment considéré comme un équilibre dynamique entre le Ying et le Yang, qui sont les 2 aspects opposés et indissociables de l’Univers (à ne surtout pas confondre avec le Bien et le Mal occidentaux, comme le film le laisse croire).
'Qi-Gong' veut d’ailleurs dire 'art d’augmenter le Ki', bonne définition du rôle joué par Liam Neeson.
Comme dans tous les arts martiaux, le 'Ki' sert pour la défense ou l’attaque, mais jamais pour l’agression délibérée.
Le pratiquant zen doit ressentir de la compassion pour tout être vivant, même s’il est son 'ennemi'.
Il doit éliminer toute émotion passionnelle (amour, haine) risquant d’obscurcir son jugement et son action.
Ceci est très bien résumé par Yoda dans l’épisode 1 pendant son enseignement à Anakin :
« La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène à la souffrance! ».
C’est cet enchaînement, à partir de la peur de perdre Padmé, qui finira par mener Anakin du côté obscur.
Le reste de la religion Jedi respecte la plus pure orthodoxie bouddhiste (causes de la souffrance, impermanence et non indépendance des choses, règles de vie des disciples, etc.), comme pourra aisément le remarquer toute personne un peu familière avec elle.
Ce cycle de films est donc un bon travail de vulgarisation de philosophies orientales pas toujours faciles à comprendre pour des occidentaux.
Il est dommage que tant de fans soient restés à un niveau assez superficiel et n’aient pas pris la peine de s’intéresser aux concepts originels cachés derrière le mythe.
Ça leur éviterait de dériver vers des mouvements plus ou moins sectaires (new-age ou autres).
On peut regretter à cet égards les tentatives de récupération de certains mouvements 'chrétiens' (sic) d'extrême-droite, qui comparent la saga au cycle arthurien des Chevaliers de la Table Ronde.
Il n'y a pas d'influences 'arthuriennes' directes dans Star Wars.
George Lucas a par contre reconnu s'être inspiré du livre de Joseph Campbell, expert en mythologie, "Le Héros aux Mille Visages" qui démonte les principes des grands mythes 'héroïques' de l'humanité (pas seulement chrétiens).
TOUS ces mythes suivent la même progression du récit, avec les mêmes types de personnages.
"Matrix" a également repris le schéma campbellien, qu'on retrouve aussi dans "Le Seigneur Des Anneaux", "Dune" ou "Harry Potter", pour ne citer que des exemples connus.
« Recherchez la liberté et vous deviendrez esclave de vos désirs. Recherchez la discipline et vous trouverez la liberté. » [Koan Zen]
A Voir également sur le sujet:
Star Wars Origins
Star Wars Origins: Joseph Campbell
Campbell, Star Wars et le mythe
The Hero With a Thousand Faces
> sur "Matrix", une intéressante étude sur ce blog.
20:00 Publié dans Bouddhismes, Cinémathèque, Ecrans Larges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, culture, bouddhismes, zen, japon, mythologies, séries | Imprimer
05/08/2005
Le Destin
Ombres et Lumières à la veille de la Renaissance occidentale
« La pensée a des ailes, nul ne peut arrêter son envol ».
En ces temps d’intolérance patriotique et religieuse, il est parfois bon de revenir sur notre passé.
C’est ce que fait dans certains de ses films Youssef Chahine, cinéaste égyptien francophone, né dans le creuset cosmopolite qu’est Alexandrie, et parfois interdit par les censures islamistes ou gouvernementales.
Dans "Le Destin" (1997), il reconstitue une tranche de vie du philosophe, juge et médecin Averroès (1126-1198), un des plus grands penseurs du 12-ième siècle, commentateur de l’œuvre d’Aristote, sage, érudit, généreux, bon vivant.
Formaté comme une comédie musicale de style 'Bollywood', le film profite des intermèdes dansés et chantés pour souligner ce côté chaleureux et humain du personnage.
L’action se passe en Andalousie, riche province de l’empire almohade (où cohabitent paisiblement musulmans, juifs, chrétiens, gitans), à une époque où les royaumes catholiques nord-européens vivent dans la crasse, l’ignorance et la misère.
Une période où les bûchers se multiplient pour éliminer les ‘hérétiques’ coupables d’avoir professé des idées contraires aux dogmes du Vatican.
C’est un film grave, où obscurantistes de tout poil (Inquisition ou groupes islamistes) font tout pour subvertir les consciences, et pour éliminer toute opposition rationnelle via les mouvements de foules et les autodafés.
C’est l’occasion de montrer comment un jeune homme moralement faible et désœuvré, vivant sans perspectives d’avenir, peut se faire endoctriner par des intégristes prêts à tout pour prendre le pouvoir.
Dans ce contexte, Averroès, tel Gandhi ou Martin Luther King, prône l’amour du prochain, la tolérance et le partage, seules solutions pour une coexistence pacifique et mutuellement enrichissante.
Pour lui, philosophe des lumières avant la lettre, la connaissance universelle, la science, les arts sont un remède à la haine, le rigorisme, le fanatisme, l’obscurantisme.
Il refuse le fatalisme, et enseigne que chacun peut être maître de sa destinée, en forgeant son caractère et sa morale aux feux de la connaissance.
En bref, un film moderne, entraînant, réaliste, militant, qui bien que n’étant pas non plus une parfaite reconstitution historique, est assez loin des clichés véhiculés dans le "Kingdom of Heaven" de Ridley Scott (ah! ces arabes qui apprennent des occidentaux comment creuser un puit, ça m‘a fait beaucoup rire).
> Fiche Cinéfil
20:00 Publié dans Cinémathèque, Croyances & Religions, Destins, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Histoire, Religions | Imprimer
03/08/2005
Jésus de Srinagar
ATTENTION : Intégristes s’abstenir.
Christ Files: la vérité n'est pas toujours là où l'on croit
L’ésotérisme semble revenir à la mode.
Le "Da Vinci Code" s’est vendu par milliers, bien qu’étant d’une qualité littéraire très moyenne.
Pour ceux qui ont été fortement déçu par sa lecture, il existe beaucoup mieux : les romans de Gérald Messadié.
Cet auteur, par ailleurs journaliste scientifique et catholique pratiquant, ne s’est jamais satisfait des incohérences dont sont truffées la Bible et ses exégèses ecclésiastiques.
Poussé par sa curiosité, et suivant une démarche d’historien, il s’est plongé dans les textes canoniques (approuvés par le Vatican) ou apocryphes (rejetés par l’Eglise seulement au 5-ième siècle) toujours acceptés dans les autres traditions chrétiennes (orthodoxe, copte, syriaque, …).
Il a aussi plongé son nez dans les textes hébraïques, hindous, bouddhistes, les manuscrits de la Mer Morte (retrouvés en nombre dans la 2-ième moitié du 20-ième siècle), ainsi que dans les ouvrages des ‘archéologues bibliques’ anglo-saxons (protestants), moins timorés dans ce domaine que les universitaires de confession catholique.
Après quoi, en bon historien, il en a tiré la substantifique moelle, dégageant les faits incontestables, écartant les incohérences, choisissant entre 2 hypothèses celle qui était la plus plausible, puis il a écrit des romans historiques particulièrement passionnants, sans plaquer sur son texte de suspense artificiel ou d’amourette à l’eau de rose.
Si l’on prend par exemple son "Jésus de Srinagar", le texte de 400 pages est complété par 94 pages de notes où il indique ses sources et ses choix, ainsi que par 6 pages de bibliographie pour ceux qui voudraient contrôler ses dires par eux-même.
On est loin de la bluette de Dan Brown !
A part ça, quel en est le sujet, me direz-vous ?
Rien de moins que la vie de Jésus depuis sa crucifixion en 30 ou 33 à Jérusalem, jusqu’à sa mort à Srinagar (Cachemire) de nombreuses années plus tard.
On vous avait appris qu’il était mort sur la croix ?
Eh bien, désolé ! Il va vous falloir réviser vos classiques et ne plus croire bêtement ce qui est raconté au catéchisme.
De toute façon, que vous acceptiez ou non les explications de Messadié, son texte est un extraordinaire roman, qui fait formidablement bien revivre le premier siècle de notre ère.
Du marigot politico-religieux existant dans la Palestine sous domination romaine, aux civilisations indiennes marquées par le bouddhisme originel, en passant par les caravanes des routes de la soie, c’est un réel plaisir de suivre Jésus confronter ses doutes et sa foi aux autres religions de l’époque.
S’il est vrai que « la vérité est ailleurs », elle n’est certainement pas cachée dans les toiles de Leonardo.
Compléments:
> Jésus et les Esseniens
> Jesus en Inde
> Jesus au Cachemire
> Les années 'perdues' de Jesus
20:00 Publié dans Bouquins, Croyances & Religions, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Culture, Histoire, Religions, Rome | Imprimer
27/07/2005
Les Envahisseurs (The Invaders)
Les Petits Hommes Verts sont Rouges et Gris
"Les envahisseurs. Ces êtres étranges venus d'une autre planète. Leur destination: la Terre. Leur but: en faire leur univers. David Vincent les a vus. Pour lui, tout a commencé par une nuit sombre, le long d'une route solitaire de campagne, alors qu'il cherchait un raccourci qu'il ne trouva jamais. Celà a commencé par une auberge abandonnée, et par un homme que le manque de sommeil avait rendu trop las pour continuer sa route. Celà a commencé par l'atterrissage d'un vaisseau venu d'une autre galaxie. Maintenant, David Vincent sait que les Envahisseurs sont là, qu'ils ont pris forme humaine, et qu'il lui faut convaincre un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé."
Diffusée au Etats-Unis en 1967-68, cette série de 43 épisodes était au confluent des 2 grandes peurs de l'époque:
- celle de l'invasion soviétique, préparée par des 'rouges' infiltrés et destinée à saboter l'American Way of Life, alors à son sommet.
- celle des soucoupes volantes et des 'petits hommes verts' dont les observations s'étaient multipliées depuis 1947, et qui faisaient régulièrement la une des journaux.
Les 2 phénomènes étaient en outre étroitement imbriqués (la peur de l'autre, de l'étranger, de l'alien).
Cette série eut un succès considérable en France (1969, année de l'alunissage d'Apollo 11), comparable à celle d'X-Files bien plus tard.
Dans les cours de récré, on jouait à l'envahisseur, le petit doigt en l'air.
Des BD spécifiques furent même éditées, qui côtoyaient dans des éditions bon marché les X-Men, Spiderman ou les Fantastic 4.
Roy Thinnes, au même titre que Patrick McGoohan ("Le Prisonnier") ou Patrick McNee ("Chapeau Melon et Bottes de Cuir") fut malheureusement piégé par ce rôle, et ne fit que des apparitions épisodiques dans d'autres séries de science-fiction, ou des films de seconde zone.
Doté d'effets spéciaux simples mais efficaces (les soucoupes bleutées, l'auriculaire raidi, la désintégration rougeoyante des envahisseurs) , il était également souligné par une musique angoissante du même compositeur que "Au Delà du Réel".
Décors glauques et scénarios paranoïaques étaient du même niveau que "X-Files", dont il est un véritable précurseur.
De quoi regretter qu'aucune réédition DVD n'ait encore été faite.
Un complot des envahisseurs infiltrés ?
Plus d'infos:
Le dossier de la Série-thèque
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